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crifier à la plus grande de toutes les associations, à l’état? L’exemple de la France était surtout cité par les publicistes de cette école, et ils ne manquaient pas d’appeler l’attention sur la puissance de cette nation où « au même instant le gouvernement veut, le ministre ordonne, le préfet transmet, le maire exécute. » Ils ajoutaient que, si l’esprit public, paraît actuellement demander en France que les excès de cette centralisation soient atténués, un mouvement tout contraire se produit en Angleterre, dans ce pays du self-government.

On pense bien que de leur côté les partisans de la décentralisation administrative ne manquaient pas d’argumens. Les travaux récens des économistes de tout pays leur fournissaient un arsenal de théories sur le véritable rôle de l’état, qui doit réduire son action à ce qui est nécessaire pour maintenir l’unité nationale et la tranquillité publique. Le pouvoir central, disaient-ils, reste d’autant plus fort qu’il se compromet moins dans les détails de l’administration. Quelques-uns soutenaient, au point de vue du droit politique, que les nouvelles provinces, en s’annexant aux anciennes, n’avaient abandonné que cette part de leurs privilèges dont le sacrifice était nécessaire pour former l’unité, et qu’elles s’en étaient réservé l’autre partie. D’autres exprimaient les plus vifs regrets sur ces franchises municipales que les gouvernemens déchus n’avaient pu détruire et qui semblaient devoir s’effacer dans l’Italie nouvelle. Les Lombards rappelaient que chez eux, sous le régime autrichien, aucun représentant du pouvoir central n’entrait dans le conseil de la commune ou de la province, que le contrôle supérieur et sans appel des affaires communales et provinciales était confié à un tribunal tout à fait indépendant du pouvoir politique, que les communes rurales étaient administrées directement par la masse des propriétaires dans des assemblées célèbres sous le nom de convocati, qu’il n’y avait pas une commune qui ne pourvût de ses deniers à l’instruction primaire et au service médical des indigens, que l’admirable système des irrigations lombardes avait donné lieu à des associations volontaires qui étaient devenues une des forces du pays. En Toscane, à Naples, en Sicile, on faisait remarquer qu’on avait donné à la vie communale une énergie toute particulière en agrégeant les petites communes de telle sorte que les agglomérations municipales fussent en moyenne de 6,000 habitans. Les Parmesans demandaient que l’on n’oubliât point que chez eux seuls les actes de l’état civil étaient confiés aux officiers municipaux. A Modène même, dans la terre classique de l’autocratie, on rencontrait une magistrature judiciaire chargée de connaître en dernier ressort des affaires contentieuses où l’administration était impliquée. Ainsi