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d’escomptes et celle de Châteauroux 4,388,000. Ces deux succursales paient leurs frais et donnent un léger bénéfice. Il y a en France bien peu d’arrondissemens qui ne puissent fournir, sinon peut-être immédiatement, du moins à bref délai, 5 millions d’escomptes par an. La Banque nous le prouve encore, car nous voyons la succursale de Saint-Lô, située dans une ville de 8 à 10,000 âmes, faire pour plus de 22 millions d’escomptes. La plupart des succursales existantes sont placées dans des chefs-lieux de département; mais il en est, comme celles de Bayonne et de Châlon-sur-Saône, dans des chefs-lieux d’arrondissement, et même, comme celles de Flers et d’Annonay, dans de simples chefs-lieux de canton. Hors des grandes places commerciales, on ne comprend pas toujours les motifs qui ont décidé les choix. On voit des villes de 10 à 15,000 âmes avoir des comptoirs, quand des villes de 20,000, 30,000, 40,000 âmes n’en ont pas. Pourquoi un comptoir à Laval, par exemple, quand on en refuse à Roubaix, à Cherbourg, à Boulogne, à Bourges, à Béziers, à Castres, à Dieppe, à Abbeville, à Montluçon, et à tant d’autres places non moins importantes ?

La multiplicité des comptoirs devient d’autant plus nécessaire qu’ils n’auraient pas seulement pour effet d’étendre le crédit commercial, mais de fonder le crédit agricole. On parle beaucoup depuis quelques années du crédit agricole. Il ne se répand pourtant pas. Pourquoi? Parce que nos cultivateurs n’ont pas à leur portée les moyens d’escompter leur papier à de bonnes conditions. Les petites succursales seraient les véritables instrumens du crédit agricole. Quand chaque arrondissement aura son comptoir, il arrivera partout ce qui arrive à Saint-Lô, dont le comptoir est principalement alimenté par les herbagers. Ici, c’est le bétail qui fournit la matière première des escomptes; ailleurs, ce sera le blé ou le vin, la laine ou la soie, suivant l’infinie diversité des cultures.

Voit-on maintenant la banque unique entreprenant de diriger ces 373 succursales ou seulement les 90 qui lui sont imposées par la loi! Il ne s’agira bientôt plus de 5 milliards d’escomptes, mais du double, du triple, car le mouvement des affaires va en s’accélérant. Avec la meilleure volonté du monde, un seul établissement peut-il prétendre à tout prévoir et à tout faire, de manière à mettre partout les ressources au niveau des besoins? Même dans l’état actuel, l’impossibilité devient chaque jour manifeste. N’est-il pas regrettable que quand la Banque a de grandes demandes à satisfaire à Paris, elle réduise ses escomptes à Marseille, à Bordeaux, à Lyon, qui n’en peuvent mais? Ne voyons-nous pas ce phénomène singulier que, si elle se croit forcée de hausser son escompte à Paris, elle le hausse par ce seul fait dans toutes ses succursales? Parce qu’il y a