Page:Revue des Deux Mondes - 1864 - tome 50.djvu/847

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

convertisseurs, et l’on en trouve un grand nombre dans les papiers de La Reynie. Le 20 novembre 1685, une conférence avait eu lieu chez le procureur-général de Harlay pour étudier les moyens de hâter les conversions. D’après La Reynie, quelques-unes des personnes présentes prétendirent qu’on ne parviendrait à rien, « si l’on ne faisoit entrer des troupes dans Paris. » C’était, on le voit, le germe des dragonnades. Moins absolu sur ce point, La Reynie dit qu’il lui paraissait suffisant de prévenir les protestans qu’on ferait élever leurs enfans par des catholiques, qu’une punition exemplaire frapperait ceux qui essaieraient de passer à l’étranger, que la maîtrise serait retirée aux artisans protestans déjà reçus maîtres, et qu’elle serait conférée sans frais aux nouveaux convertis. Il proposait encore de réunir chez lui les convertis, par cinquante ou soixante, avec un pareil nombre de protestans déjà ébranlés, dans l’espoir de les entraîner par l’exemple. Il croyait en outre nécessaire de faire distribuer quelques aumônes au nom du roi à ceux qui étaient dans le besoin. Suivant lui (et son opinion était relativement très modérée), cet ensemble de mesures rendrait inutile la coopération des soldats.

Ces conseils furent entendus, du moins en ce qui concernait Paris, et le spectacle des conversions par logemens paraît avoir été, sauf pourtant quelques exceptions, épargné à la capitale. Par contre, celles à prix d’argent, dont le gouvernement se contentait pour le moment, espérant que le temps ferait le reste, abondèrent, et il en existe bien des preuves authentiques. Un ancien protestant, jadis très compromis à la cour pour son dévouement à Fouquet, mais depuis rentré en grâce et très bien auprès de Louis XIV, dont il était devenu le rédacteur intime, Pellisson, avait été chargé de la distribution des aumônes royales à ceux qui feraient acte de foi catholique. On doit à La Reynie la conservation de beaucoup de ces actes de foi. Les uns sont très développés, et c’étaient ceux qu’on exigeait sans doute des protestans relaps; les autres, non moins catégoriques et positifs, mais très concis, imprimés d’ailleurs comme les premiers, de telle sorte que les nouveaux convertis n’avaient qu’à signer, sont ainsi conçus : « Je crois de ferme foi tout ce que l’église catholique, apostolique et romaine professe. Je rejette sincèrement toutes les hérésies et opinions erronées que la même église a condamnées et rejetées. Ainsi Dieu soit à mon aide et ses saints Évangiles, sur lesquels je jure de vivre et de mourir dans la profession de cette même foi! » Les rôles indiquant par quartier le nom des personnes qui se convertissaient et des sommes qui leur étaient allouées ont également été conservés. Quand au contraire un protestant refusait de se convertir, une lettre de cachet