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en réalisant des économies goûtées par le parti radical, qui marche avec lui. La retraite de M. Stansfeld eût tendu à ébranler la majorité, déjà si faible, qui soutient le cabinet. Lord Palmerston, qui a toujours vaillamment couvert ses amis en détresse, n’a pas voulu accepter la retraite de M. Stansfeld. Nous croyons cependant que renseignement qui ressort de cet incident regrettable ne sera point perdu. On doit rendre au gouvernement français cette justice, qu’il s’est conduit dans cette circonstance avec une discrétion habile et de bon goût ; il a laissé ainsi la société anglaise faire seule justice de l’imprudence de l’un de ses membres. Il faut encore porter cette aventure au compte de l’anarchie actuelle, anarchie dont le ministère anglais a donné plusieurs fois le spectacle dans ces derniers temps, et qui semblait annoncer sa chute prochaine. Le membre le plus brillant de ce cabinet, M. Gladstone, n’a point échappé lui-même à la mauvaise influence qui règne dans les sphères gouvernementales. M, Gladstone a présenté cette année un admirable projet de loi, une de ces mesures qui honoreront le plus son illustre carrière, en proposant en faveur des ouvriers une institution d’assurance sur la vie qui doit être administrée par l’état. Malheureusement, dans le beau discours qu’il a prononcé à cette occasion, il a glissé sans utilité et sans motifs une allusion à un membre de la chambre des communes, laquelle, relevée avec vigueur et talent par le député attaqué, a donné matière à un fâcheux débat personnel qui s’est terminé par la rétractation loyale du chancelier de l’échiquier. C’est cependant sur M. Gladstone qu’il faut compter pour donner du lustre à la seconde partie de la session du parlement anglais. Il va présenter son budget : en Angleterre, un budget fait ou défait la popularité d’un cabinet. Le sort du ministère anglais est donc attaché en grande partie au prochain budget de M. Gladstone.

La politique intérieure aurait entièrement chômé chez nous depuis quinze jours sans les récentes élections parisiennes et sans une discussion importante soulevée au sénat par le rapport d’une pétition. Les élections de Paris ne peuvent donner lieu à aucune observation ; il n’y avait pas de luttes de partis et de candidatures ; le résultat était connu d’avance. Quant à la discussion du sénat, on ne saurait la passer sous silence, car elle montre combien les principes fondamentaux de la société moderne sont loin encore d’avoir pénétré même parmi ceux qui sont appelés aujourd’hui, par la place qu’ils occupent dans les grands corps de l’état, à influer sur la direction de la France. L’auteur de la pétition présentée au sénat demandait que les publications récentes soutenant des doctrines contraires à la religion fussent l’objet d’une répression publique. Cette pétition était un des échos de la bruyante réaction qu’a soulevée le livre fameux de M. Renan, la Vie de Jésus. Un cardinal, M. de Bonnechose, n’a point hésité à demander pour le dogme catholique l’appui du pouvoir politique ; M. Delangle et le commissaire du gouvernement ont victorieusement soutenu le véritable