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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




31 mars 1864.

On ne saisirait point le vrai caractère du réveil intellectuel et politique dont nous avons eu, dans ces derniers temps, à indiquer et décrire les premiers symptômes, si l’on perdait de vue un curieux phénomène au milieu duquel il se produit, et avec lequel il contraste. À mesure que le sentiment libéral redevient en France vigilant, alerte et confiant, il se passe dans les régions gouvernementales de l’Europe des choses étranges. Tandis qu’en bas les signes de vie se manifestent avec une fraîcheur pleine de promesses, en haut régnent l’indécision, l’incohérence, le décousu. Depuis une douzaine d’années, on s’était accoutumé à voir les gouvernemens donner l’impulsion aux événemens ; c’était d’eux que l’on attendait une certaine direction des choses. Depuis bientôt une année, cette direction est en train de leur échapper. On ne comprend rien à leurs desseins, s’ils en ont, ou plutôt ils semblent n’en point avoir. Les gouvernemens sont atteints d’une curieuse mollesse, ne laissent percer que leurs hésitations, et paraissent avoir perdu la faculté d’établir entre eux un concert quelconque. S’il fallait définir d’un mot cet état de choses, on dirait que l’action gouvernante et dirigeante en Europe est en proie à une anarchie indolente. C’est cette simultanéité et ce contraste d’un mouvement libéral prenant son point de départ au foyer intérieur de la France et de cette anarchie indolente travaillant sourdement les sphères gouvernementales qui marquent le trait de la situation. On n’a qu’à jeter un coup d’œil sur les principaux faits du moment pour se convaincre que nous donnons à cette situation son nom véritable.

Commençons par le fait extérieur qui en ce moment a pour la France l’intérêt le plus prochain, l’organisation de l’empire du Mexique au profit de l’archiduc Maximilien. Quand l’archiduc a eu terminé sa visite à Paris, n’aurait-on pas cru que tout était fini ? Les arrangemens politiques avaient