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structions très minutieuses ont été rédigées par le dépôt de la guerre, et ont prescrit, pour tous les travaux qui s’exécutent dans cet établissement, la largeur à donner aux routes et aux chemins de communication de toute classe, le mode de représentation des villes et des villages, des châteaux et des fermes, les dessins conventionnels qui figurent les bois, les prairies, les rochers et les sables. La forme et la dimension des écritures à placer sur la carte ont été rigoureusement fixées suivant l’échelle et l’importance des objets. Les limites des états sont indiquées par d’autres traits que les limites des départemens. Grâce à ces conventions très claires et très nettes, on peut réunir sur une carte de petit format tous les traits saillans, tous les caractères distinctifs d’une grande étendue de terrain. Il importe seulement que celui qui consulte la carte ait la clé de ce système conventionnel.

C’est surtout par l’expression des formes du terrain que les cartes modernes diffèrent des cartes anciennes. Dans le système qui était autrefois en usage, les montagnes étaient figurées par de petites élévations de profil qui supposaient l’œil du spectateur dans le plan de la carte; la direction des chaînes était mal indiquée; les cols et les sommets se devinaient à peine. Les géographes du dernier siècle rendirent cette méthode plus expressive en changeant la position du centre de perspective d’où l’œil du spectateur est supposé regarder le tableau. Ils inventèrent la topographie à lumière oblique, où les montagnes sont dessinées avec un côté éclairé et l’autre dans l’ombre, et ils obtinrent des effets pittoresques des plus heureux par cette opposition de l’ombre et de la lumière.

Vers la même époque, Buache, géographe français, indiqua un procédé tout différent pour exprimer les ondulations du sol. Ayant à faire comprendre ses idées sur la topographie sous-marine du Pas-de-Calais, il imagina, dans un mémoire qui date de 1744, de tracer sur la carte la limite qu’occuperaient les eaux, si le niveau s’en abaissait de 10 toises, puis de 20, de 30 toises, etc. Il obtint par ce moyen des courbes horizontales très espacées lorsque le terrain était faiblement incliné, et très rapprochées au contraire lorsque la pente était rapide. Sur les continens, on peut obtenir le tracé de ces mêmes courbes en supposant que les eaux de l’Océan s’élèvent peu à peu au-dessus du niveau actuel. C’est en quelque sorte une représentation géométrique et mathématiquement exacte des ondulations du sol; aussi les ingénieurs civils et militaires lui ont-ils unanimement donné la préférence pour tous les plans topographiques où l’on trace les projets de routes, de canaux et de fortifications; mais les cartes dessinées d’après cette méthode ne conviendraient peut-être pas pour l’usage habituel.

A l’époque où l’on préparait les premières feuilles de la nouvelle