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Le navigateur, perdu à la surface de l’Océan, peut bien se contenter d’indications approximatives, parce qu’une erreur de quelques kilomètres en plus ou en moins est insignifiante à ses yeux tant qu’il est en pleine mer, et que dans le voisinage des terres il rectifie sa position d’après l’aspect de la côte; on comprend qu’il n’en est plus ainsi sur la terre ferme, et qu’une erreur de 100 mètres sur la distance de Paris à Orléans ne laisserait pas d’avoir de l’importance. Ce n’est pas que les observations astronomiques ne soient excellentes lorsqu’elles se font avec des instrumens bien montés et qu’on a le temps de les prolonger suffisamment. La latitude, qui ne dépend que d’une mesure relativement facile, celle de la hauteur du soleil ou d’une étoile au-dessus de l’horizon, est en général assez exactement indiquée. Sur la longitude au contraire, les erreurs sont souvent graves. On a découvert récemment qu’il y a une erreur de 30 à 35 secondes, c’est-à-dire de 700 à 800 mètres, sur la longitude que toutes les cartes modernes assignent à Madrid par rapport au méridien de Paris.

Les horloges de deux villes, dont l’une est située plus à l’ouest que l’autre, ne marquent pas, on le sait, la même heure, et la différence d’heure est d’autant plus grande que ces deux villes sont plus éloignées dans le sens de la longitude. La marche des chemins de fer, réglée uniformément en France sur l’heure de Paris, a rendu ce phénomène très sensible; à la frontière rhénane, l’heure du chemin de fer français est à Wissembourg en retard de 27 minutes et à Kehl en retard de 32 minutes sur l’heure du chemin allemand. De même les horloges de Berlin avancent de 50 minutes sur celles de Paris, et celles de Saint-Pétersbourg de 1 heure 7 minutes sur celles de Berlin. Mesurer cette différence d’heure est une des méthodes que l’on emploie pour déterminer la longitude, et l’un des moyens les plus simples de la mettre en pratique consiste à transporter successivement en divers lieux une montre bien réglée. C’est ainsi qu’agissent les marins; ils ont d’habitude à bord de leur bâtiment deux chronomètres qui se contrôlent mutuellement et se suppléent en cas d’accident; mais, lorsqu’une grande précision est nécessaire, il faut des soins infinis. Aussi, quand on a voulu connaître par ce procédé la différence de longitude entre deux points éloignés et importans, on a dû faire de véritables expéditions chronométriques. Telle est celle que le gouvernement russe a fait exécuter en 1843 entre l’observatoire impérial de Poulkova, près de Saint-Pétersbourg, et l’observatoire danois d’Altona. On fit quinze voyages en transportant chaque fois soixante-huit chronomètres d’une station à l’autre.

On peut encore déterminer la longitude en observant de deux stations différentes l’heure à laquelle se produit un phénomène {{Tiret|ce-