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dent une couche d’un centième de millimètre d’épaisseur. Aussi les géographes peuvent-ils négliger cette correction sur les mappemondes et les cartes d’ensemble; l’effet n’en devient sensible que sur les cartes topographiques à grande échelle qui embrassent une vaste étendue de pays.

Cette hypothèse, assez séduisante en apparence, de considérer le globe terrestre comme un ellipsoïde à trois axes inégaux, repose jusqu’à présent, il faut l’avouer, sur des observations trop incertaines et surtout trop restreintes pour que les savans s’en contentent. Comme complément indispensable des observations délicates et des calculs arides sur lesquels le géodète s’appuie, il faut toujours considérer l’approximation du résultat qu’il a obtenu, c’est-à-dire l’amplitude de l’erreur que les défauts des instrumens et l’incertitude des calculs font naître. On sait, à n’en pouvoir douter, que l’aplatissement des pôles, tel qu’on l’a calculé jusqu’à ce jour, est exact à moins d’un centième près, tandis que l’aplatissement hypothétique de l’équateur n’a pu être déterminé qu’avec une approximation tellement insuffisante qu’il est même encore permis de douter que cet aplatissement existe. Au reste, il est assez singulier que ces calculs purement théoriques, qui signalent à notre attention particulière les méridiens de 12 et de 102 degrés de longitude orientale, reçoivent une première confirmation par l’aspect physique du globe. En jetant les yeux sur une mappemonde, on remarquera que le méridien de 12 degrés coupe l’Europe et l’Afrique sur une petite longueur, et que sur tout le reste de son parcours, y compris l’hémisphère qui nous est opposé, il traverse des océans. De tous les méridiens terrestres, c’est à peu près celui qui est le plus océanique. Au contraire, le méridien de 102 degrés coupe l’Asie parallèlement aux longues chaînes de montagnes de l’empire birman, il passe près de l’Australie, et, dans l’autre hémisphère, côtoie les deux Amériques en coïncidant presque avec le système montagneux des Andes, que les géologues considèrent comme le produit le plus récent des cataclysmes terrestres. Ce méridien traverse les continens sur une plus grande longueur qu’aucun autre. Il y a dans ces faits un rapprochement peut-être fortuit, mais à coup sûr ingénieux, entre deux sciences, la géodésie et la géologie, qui étudient l’une et l’autre notre planète à un point de vue très différent. Il ne serait pas téméraire de supposer que les dernières révolutions du globe ont altéré la figure circulaire de la terre primitive, et lui ont donné à son équateur cette forme elliptique que les géographes semblent découvrir aujourd’hui.

Il reste cependant un doute à écarter avant d’admettre le principe même de l’ellipticité de l’équateur. Cette hypothèse repose tout