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Les événemens du 19 sont bien connus : vers dix heures du matin, Gustave monte à cheval et se rend à l’arsenal, où il assiste à quelques exercices; entouré d’un grand nombre de jeunes officiers dévoués qu’il a fait prévenir, il traverse la ville en saluant avec grâce partout sur son passage, puis rentre au château. La garde montante venait d’arriver, celle qu’elle devait relever n’était pas partie encore. Gustave rassemble les officiers dans le poste, il les harangue ; sauf trois d’entre eux, ils prêtent immédiatement un nouveau serment de fidélité. Il s’adresse ensuite aux soldats; une seule réponse négative est couverte par les exclamations favorables. Le bruit avait attiré le peuple, qui, après avoir entendu les dernières paroles de Gustave, mêle ses cris à ceux de la garde. Les sénateurs étaient déjà réunis comme à l’ordinaire dans le château même; ils veulent accourir pour savoir la cause d’un si grand tumulte, mais ils trouvent aux portes une trentaine de grenadiers qui, croisant la baïonnette, leur apprennent qu’ils sont gardés à vue. Pendant ce temps, Gustave, suivi d’une grande foule d’officiers et de citoyens, avec un mouchoir blanc au bras en signe de ralliement, se dirige vers les principaux postes de la ville, et partout on l’acclame sans nulle résistance. Il adresse la parole aux groupes populaires, répétant qu’il s’agit seulement de mettre fin à l’anarchie, qu’il refuse le pouvoir absolu, et qu’il veut mériter la confiance, l’amour de ses sujets : tout cela dit avec chaleur, avec entraînement, et en langue suédoise, chose inaccoutumée avec une cour qui était depuis si longtemps française ou allemande. Il arrive enfin au parc d’artillerie et y prend quelques mesures militaires qui seront inutiles, car il suffit qu’il ait fait arrêter les principaux chefs ou partisans des états, y compris le baron Rudbeck, devenu un instant redoutable par une tentative de résistance armée; les sénateurs sont prisonniers dans la chambre du conseil pour trois jours, et les membres du comité secret, loin de chercher à se réunir, ne songent qu’à leur propre salut; en moins d’une heure, toute la capitale a fait sa soumission.

La journée du 20 fut consacrée à recueillir les sermens et à prévenir les dangers les plus pressans hors de la capitale. Il restait à faire accepter une constitution nouvelle ; Gustave en avait trois dans sa poche quand il parut en costume royal devant les membres de la diète, convoqués pour le 21 dans la grande salle du château; le choix de l’exemplaire, c’est-à-dire probablement d’une constitution plus ou moins libérale, devait dépendre des dispositions qu’il rencontrerait. Le projet dont il donna lecture avait été préparé par lui-même; à la manière dont il fut accueilli, on eût dit que cette assemblée n’avait jamais compté que des partisans dévoués de la cause royaliste. Sauf un amendement qu’un membre de la noblesse