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fait perdu son caractère politique. Il cessa de raisonner ses déprédations et ses ravages, attaquant indifféremment les propriétés de tous les partis : il ne menaça plus les villes et n’assaillit plus ou presque plus les villages; il s’inquiéta beaucoup moins du pape et de François II, mais il brûla les fermes et les récoltes.

Tels furent les principaux exploits des bandits en 1862 dans les provinces qui souffrirent le plus de leurs incursions, c’est-à-dire dans le centre du royaume et particulièrement sur le versant oriental des Apennins déclinant vers l’Adriatique. Les Calabres restèrent tranquilles : un hardi chasseur d’hommes, le colonel Fumel, qui faisait cette guerre en amateur avec une poignée de Calabrais, y suffisait pour contenir les brigands. Aux environs de Naples, Pilone se promenait toujours autour du Vésuve, où son fameux corps d’observation faisait plus de peur que de mal. Un autre chef beaucoup plus redoutable, nommé Varrone, qui rôdait non loin de là, fut tué par un de ses hommes. Dans la province de Salerne, Tardio reparut tout à coup et traversa quelques villages; mais sa forte bande fut mise en pièces au premier choc, et trois cents brigands se laissèrent prendre en un moment. Au mois de septembre 1862, la fatale entreprise de Garibaldi dégarnit un instant de troupes l’intérieur du pays : il s’ensuivit une légère recrudescence du brigandage; mais après Aspromonte l’état de siège permit d’arrêter les manutengoli, c’est-à-dire les complices, receleurs ou banquiers des voleurs, et ces derniers se soumirent. A la fin de la même année, Crocco, Ninco-Nanco, battus dans plusieurs rencontres, — une fois entre autres par les volontaires hongrois, qui leur firent beaucoup de mal, — étaient rentrés dans leurs bois. Cavalcante, dégoûté du métier, s’était fait prendre dans Naples même, à la préfecture de police, où il était venu effrontément demander un passeport; il comptait aller vivre de ses rentes en France. Les forces des prétendus insurgés dans la Principauté-Citérieure et dans la Basilicate se réduisaient à une quarantaine de vieux routiers sur le territoire de Melfi, quelques vagabonds dans les districts de Sala, de Campagna, et une vingtaine de voleurs entre Amalfi et Castellamare. Il y en avait eu deux cents en campagne au commencement de l’année 1862 et douze cents vers la fin de l’année 1861, réunis sous les ordres de Crocco et de Borjès. Plus haut, autour de Bénévent et de Campobasso, les innombrables troupes de malandrins avaient disparu : treize chefs sur dix-neuf étaient morts. Dans les Fourches-Gaudines, l’illustre Picciocco, qui, après avoir tué son collègue Zappatore, avait perdu dans un combat son ami Calabrese, ne traînait plus derrière lui qu’une dizaine de pauvres diables, derniers débris de la fameuse brigade du général Cipriano La Gala. Dans la terre de Bari, très effrayée un moment par une incursion de Caruso, la forte