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François II, sans prévoir les calamités inutiles dont il allait accabler son pays, permit l’organisation de bandes armées ; mais ces premières bandes, formées surtout de soldats et de gendarmes, furent nettement politiques et commandées par des hommes qu’on peut avouer. On peut citer parmi ces derniers le comte Émile de Christen. Le général napolitain Luvarà ne dédaigna pas de diriger une de ces expéditions où quelques royalistes de bonne foi se battirent en gens de cœur. Des élémens mauvais s’étaient déjà glissés sans doute dans ces troupes de partisans, les saccageurs (saccheggiatori) de Giorgi se recrutèrent en partie dans les bagnes ; mais l’on n’en doit pas moins distinguer cette première explosion des tristes équipées qui se succédèrent plus tard. Quant à la guerre de partisans qui fut tentée près des frontières romaines pendant le siège de Gaëte, elle ne se rattache pas directement à l’histoire du brigandage. Ce fut une diversion, une longue sortie des assiégés, et non pas un soulèvement d’assassins et de voleurs. Aussi le mouvement fut-il réprimé très vite, et les chefs de guérillas, rejetés dans les états pontificaux, posèrent les armes après la reddition de Gaëte. Leur tâche était accomplie, le roi proscrit les avait relevés de leur serment.

Le véritable brigandage napolitain, qu’on essaya plus tard de transformer et d’astreindre à une organisation militaire, se recruta d’abord parmi d’anciens galériens. Plusieurs d’entre eux s’étaient évadés pendant la révolution, d’autres avaient été graciés par le dernier décret du dernier roi ; quelques-uns s’étaient faits garibaldiens, et on les avait vus se battre devant Capoue. Après la guerre, ils demandèrent des gratifications et des places ; le pouvoir régulier examina leurs titres et voulut les renvoyer en prison : alors ils se sauvèrent dans les bois et formèrent des bandes. Ainsi commencèrent plusieurs brigands, entre autres le fameux Crocco, qui est devenu chevalier de Saint-George et général en chef de tous les malandrins du pays. Il fut des premiers à se mettre en campagne. Le licenciement des troupes après la reddition de Gaëte renforça les bandes, moins pourtant qu’on ne l’a cru. Bon nombre de soldats bourboniens, en rentrant dans leur village, incapables désormais de reprendre la bêche et le marteau, se joignirent aux bandits qui couraient déjà les grandes routes. Bien plus, ceux qui consentaient à servir encore et qui se présentèrent aux autorités de leurs villages, aussitôt qu’ils furent appelés ou rappelés, durent souvent retourner chez eux, faute de dépôts où l’on pût les recevoir ; il y en eut qui furent renvoyés jusqu’à trois fois et qui se firent brigands parce qu’on ne voulait pas d’eux comme militaires. D’autres s’enfuyaient munis de congés que des faussaires habiles leur fa-