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transvidés dans des gazomètres ordinaires chez les consommateurs, car il suffisait de rapprocher, à l’aide d’un simple mécanisme, les deux fonds solides pour faire sortir la presque totalité du gaz, après avoir établi une communication avec le gazomètre par des tubes flexibles.

Dans ces conditions nouvelles, l’industrie du gaz portatif, fondée en 1836 à Paris, eut d’abord quelque succès. Cependant les faibles bénéfices que réalisait l’entreprise, les embarras qu’occasionnait la circulation de ces énormes voitures dans les rues de la capitale firent chercher une autre solution ; on y arriva par une double modification dans la production du gaz et dans les dispositions relatives à l’emmagasinement, au transport et à la distribution à domicile. Les inventions nombreuses qui s’étaient succédé de 1818 à 1845 avec le concours de MM. Déodore et Baradère, Manby, Wilson et Henry, Piquet, Hanchett et Smith, Houzeau-Muiron et Rohaut de Fleury, avaient avancé l’étude de ce difficile problème, dont la solution définitive était réservée à MM. d’Hurcourt et Hugon. Ce n’est qu’à dater de l’époque où ces savans ingénieux, appliquant les notions chimiques primitives de Selligue sur la distillation des schistes, les données fournies par Jeanneney sur le gaz riche du bog-head d’Ecosse, imaginèrent eux-mêmes et améliorèrent par degrés tout un système d’emmagasinement du gaz sous une pression bmitée à 10 ou 12 atmosphères (au lieu de 30 à 40 anciennement essayée) et ajoutèrent enfin de nouveaux moyens de distribution régulière, ce n’est qu’alors seulement que l’industrie du gaz portatif devint prospère, et se propagea sous la direction de la même compagnie dans plusieurs villes de France et de l’étranger[1].

Tels ont été les progrès scientifiques ou économiques de la fabrication du gaz d’éclairage, telles ont-été les inventions auxquelles cette industrie de date si récente a donné l’essor, et l’on ne peut mieux terminer cette étude qu’en rappelant à quelle cause sont dus de si importans résultats. Cette cause, qui agira de plus en plus, il faut l’espérer, au sein des sociétés modernes, c’est le bienfaisant accord de la science, et des arts utiles.


PAYEN, de l’Institut.

  1. L’usine centrale de la rue de Charonne produit journellement 1,000 mètres cubes du gaz en question, équivalant à près de 4, 800 mètres cubes du gaz ordinaire de la houille. Sans doute la distillation du bog-head, ne laissant qu’un résidu charbonneux et argileux à peu près sans valeur, ne peut produire le gaz aussi économiquement que le traitement de la houille, car celle-ci donne en outre plusieurs produits accessoires, dont la valeur diminue le prix coûtant du produit principal ; mais les bénéfices sont encore assez rémunérateurs pour que l’industrie spéciale ait sa raison d’être et vienne combler une importante lacune.