Page:Revue des Deux Mondes - 1864 - tome 50.djvu/421

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

du charbon incandescent ; le goudron interposé, tout en brûlant, s’agglutine aux menus fragmens tuméfiés eux-mêmes, puis se transforme partiellement en un coke qui se soude avec le coke simultanément produit par la houille menue : il en résulté que la combustion s’achève sans que les gros fragmens soient désagrégés, et sans qu’ils puissent mettre obstacle à l’accès de l’air entre les barreaux de la grille. Ce nouveau combustible, vendu sous la garantie d’un maximum de cendres de 6 pour 100, est maintenant très recherché par les compagnies de chemins de fer. Il représente en effet une puissance calorifique un peu plus grande sous le même poids que la houille en gaillettes ou en gros fragmens de première qualité. Ce fait est facile à expliquer, si l’on se rappelle que les substances étrangères à la houille, inertes comme combustible, ont été d’abord en grande partie éliminées, et que d’un autre côté l’on a introduit dans le mélange, fait à chaud, 8 pour 100 d’un goudron épais, dont le pouvoir calorifique est moitié plus grand, en raison de l’hydrogène qu’il contient, que celui du carbone pur.

Cette ingénieuse méthode, ainsi perfectionnée et mise en pratique sur une grande échelle, donnant un combustible plus énergique à un prix moindre que la houille ordinaire, a trouvé de larges débouchés. Déjà les usines de M. Dehaynin jeune et d’une compagnie rivale peuvent livrer annuellement 255,000 tonnes de 1,000 kilogrammes ou 255 millions de kilogrammes de ces houilles agglomérées. Le résultat définitif, doublement utile au point de vue de l’intérêt général, c’est de supprimer l’encombrement sur le carreau de la mine, tout en produisant avec des débris autrefois négligés une houille de première qualité sous des formes régulières bien appropriées au chauffage des chaudières à vapeur. Une conséquence directe de cette transformation des débris des mines de houille en un combustible puissant, livré à 13 ou 14 francs la tonne, c’est de réduire les frais de traction sur les chemins.de fer. Il est inutile de faire ressortir l’importance d’un pareil résultat. En résumé, l’examen de cette industrie, où un résidu provenant du goudron, en s’ajoutant aux menus débris des mines de houille, compose un combustible plus puissant et plus économique à la fois que la houille elle-même, conduit à cette proposition, absurde en apparence et néanmoins exacte, que tout fabricant de gaz d’éclairage est en définitive un producteur de combustible[1].

  1. Voici la simple démonstration de ce fait. 100 kilos de houille distillée produisent en France 6 kilos, en Angleterre 7 kilos de goudron ; la moyenne proportionnelle est au minimum de 6k, 5, dont on obtient, après extraction des huiles volatiles, 4k, 875 de brai gras suffisant à la fabrication nouvelle de 60k, 93 de houille agglomérée. Si l’on y ajoute 50 kilos de coke disponible dans les usines comme en excès sur la quantité utile au chauffage des cornues, il est évident que pour 100 de houille distillée on obtient directement et indirectement 110 de combustible minéral livrable à la consommation pour les usages domestiques et le chauffage des générateurs. Cette production totale, ou, si l’on veut, la reconstitution d’un combustible rendu usuel, s’élèverait à 135 kilos pour 100 kilos de houille distillée, si l’on employait pour le chauffage des cornues, par 1& procédé de l’oxyde de carbone que nous avons décrit ; des houilles menues ou terreuses impropres à d’autres usages. Ainsi donc la fabrication du gaz, considérée jusqu’ici comme la cause d’une effrayante consommation de houille, devient une source de reproduction du combustible minéral.