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La plus importante fonction du barillet, outre le premier refroidissement du gaz, consiste à prévenir, par la couche liquide qu’il force le gaz à traverser, toute communication des cornues entre elles, et à isoler ainsi les fuites de gaz et les explosions partielles que la fracture accidentelle d’une cornue pourrait occasionner. Sortant du barillet, le gaz, très chaud encore et impur, est dirigé vers des appareils réfrigérons et épurateurs. Ce sont d’abord des séries de tubes dressés à l’air libre et refroidis à volonté par un courant d’eau, entre lesquels on distribue le gaz, animé d’une vitesse de 2 à 3 mètres par seconde, qu’une pompe aspirante lui imprime[1]. Dans cette première circulation, le gaz rencontre une surface refroidissante égale à 10 mètres carrés pour 1,000 mètres cubes. La même pompe refoule successivement le gaz dans de vastes colonnes creuses, hautes de 12 à 15 mètres, remplies de coke en fragmens peu volumineux, où le gaz, par l’effet du refroidissement et des lavages, laisse déposer la plus grande partie du goudron et des sels ammoniacaux[2]. Après cette première épuration toute physique, le gaz contient encore des composés ammoniacaux, des hydrocarbures très volatils, du gaz oxyde de carbone et de l’hydrogène sulfuré (acide sulfhydrique, formé de soufre et d’hydrogène et répandant une odeur infecte). Il est alors dirigé par la pression acquise dans deux séries de larges caisses en tôle, munies de trois étages de filtres chargés d’une couche épaisse de sesquioxyde de fer hydraté, au travers desquels il passe successivement.

Durant cette filtration multiple, le gaz sulfhydrique est décomposé : le soufre se dépose à mesure que l’hydrogène s’unit avec une partie de l’oxygène du peroxyde métallique, laissant engagés dans les interstices, outre le soufre éliminé et l’eau produite, inodores tous les deux, des essences sulfurées à odeur nauséabonde, enfin quelques composés qui se prêtent à diverses applications. Le gaz, après cette épuration et à la sortie de la deuxième série des filtres à l’oxyde de fer[3], se trouve débarrassé du principal composé infect. On s’en assure en dirigeant pendant quelques minutes un mince filet de ce gaz sur un papier blanc imprégné d’acétate de plomb. Si le gaz est suffisamment pur, le papier reste blanc ; lorsque au contraire l’épuration est imparfaite, le papier devient brun, car le soufre

  1. Cette aspiration est tellement bien réglée à l’aide d’un régulateur, que les cornues ne supportent aucune pression sensible à l’intérieur, et l’on évite ainsi les fuites par les joints entre les vases distillatoires et les premiers réfrigérans.
  2. On a depuis peu de temps substitué dans plusieurs usines aux colonnes pleines de coke des colonnes semblables vides munies à l’intérieur de lames de tôle ou chicanes entre lesquelles le gaz circule en montant, tandis que l’eau versée en arrosage facilite le dépôt des vapeurs globulaires.
  3. 4 mettes carrés de ces surfaces filtrantes sont nécessaires pour épurer au passage 1,000 mètres cubes du gaz de la houille.