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été réduite à l’obéissance que par une transaction ; des mouvemens graves à Syra, c’est-à-dire dans la première cité commerciale de la Grèce, à Athènes même, avaient coïncidé avec la révolte de Nauplie. Le cabinet Miaoulis avait dû se retirer après de vaines tentatives pour faire comprendre au roi Othon, dont il partageait l’impopularité, la nécessité de sortir d’une voie qui menait infailliblement à la catastrophe. Le ministère Colocotronis, qui lui avait succédé, se débattait à la fois contre les partis de plus en plus animés et contre l’obstination royale, sans arriver à faire plus que ses prédécesseurs. Depuis que l’insurrection de Nauplie s’était terminée sans amener aucun changement, l’imminence d’une crise encore plus grave ne pouvait être méconnue de personne. Aussi les intrigues les plus contradictoires se croisaient, poussées avec une inconcevable activité. Le roi lui-même conspirait avec le parti d’action italien pour détourner vers une entreprise extérieure l’agitation des esprits et pour éviter ainsi la nécessité d’accorder des réformes libérales. Des agens parcouraient la Turquie afin d’y préparer un soulèvement, tandis qu’une correspondance suivie s’échangeait entre Caprera et le palais d’Athènes. Lorsqu’en 1862 Garibaldi se rendit en Sicile, une portion de la flotte grecque vint jusqu’à la pointe méridionale du Péloponèse pour l’attendre et l’escorter en Orient ; mais le célèbre agitateur changeait bientôt de projets et se lançait dans la folle entreprise qui le conduisit à l’échec d’Aspromonte. Une autre intrigue, ourdie aussi dans le palais même, tendait à faire passer le sceptre de la maison de Wittelsbach dans celle d’Oldenbourg, à laquelle appartenait la reine Amélie. En revanche, la légation de Bavière était en relations étroites avec les révolutionnaires : elle les flattait, les encourageait, s’efforçait de leur servir de centre ; espérant sauver la dynastie en sacrifiant le roi, elle poussait à un mouvement qui contraignît Othon à abdiquer en faveur d’un de ses neveux, fils du prince Luitpold. Les autres ambassades, au lieu de chercher à détourner la crise, travaillaient à en tirer parti. La Turquie fomentait le désordre uniquement pour le désordre, son intérêt étant d’entraver le progrès, qui, en se développant en Grèce, devient un danger pour elle ; la légation d’Italie accueillait les mécontens qui parlaient d’appeler au trône un prince de la maison de Savoie. Quant à la Russie, elle intriguait en faveur du duc de Leuchtenberg, un prétendant de religion grecque, neveu du roi Othon, proche parent du tsar et de l’empereur des Français, et la légation de France, si elle ne s’associait pas activement à toutes ces intrigues, les voyait du moins d’un œil favorable. Enfin l’Angleterre ne s’endormait pas non plus ; inactive en apparence, elle ourdissait une trame encore plus serrée et préparait sous main la candidature du prince Alfred. Partis intérieurs et gouvernemens