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chèvre et la vache, et peut-être le cochon. Le cheval est d’une introduction postérieure, et la multiplication des autres races domestiques coïncide avec son apparition. Quelques-uns de ces animaux étaient déjà contemporains des rhinocéros et des éléphans à l’époque où la Suisse jouissait d’un climat beaucoup plus tempéré que celui qui règne aujourd’hui. Une période de froid amena l’ancienne extension des glaciers qui, descendant le long des vallées, couvrirent la plaine suisse d’un manteau de glace. Les éléphans et les rhinocéros disparurent ; mais le cerf, le renne, le daim, le cochon, le loup, le renard, le castor, le lièvre, dont les os sont mêlés dans les cavernes avec ceux des grands pachydermes, survécurent à la période de froid ; ils repeuplèrent les nouvelles forêts qui envahirent le terrain abandonné par la glace, et plusieurs d’entre eux se sont perpétués jusqu’à nous.

Ce rapide exposé ne donne pas sans doute une idée complète des travaux publiés depuis 1827 par la Société helvétique ; mais nous en avons dit assez pour montrer quels services de pareilles associations peuvent rendre à l’histoire naturelle. En France, nos sociétés de géologie, de botanique et de météorologie sont là pour le prouver. Par la force des choses, par la puissance irrésistible de la liberté, elles sont devenues le centre d’activité des hommes voués à l’une ou l’autre de ces sciences ; c’est dans leur sein que les questions se discutent et que les problèmes se résolvent : elles sont l’avant-garde des académies et des corps officiels, véritables aristocraties intellectuelles chargées de modérer l’élan du peuple scientifique, mais dépourvues de cette jeunesse et de cette initiative qui ouvrent des voies nouvelles. Les deux genres d’associations sont d’ailleurs également utiles et nécessaires ; elles exercent l’une sur l’autre une influence qui se traduit par les progrès rapides dont nous sommes témoins.

En Suisse, la Société helvétique des sciences naturelles a été le lien des savans éparpillés dans les différens cantons : elle a doublé leurs forces et leur zèle en les mettant directement en contact les uns avec les autres. Les réunions annuelles ont eu lieu successivement dans la plupart des villes de la confédération ; chaque fois l’agitation scientifique a fait naître d’abord la curiosité, puis l’action individuelle ou collective. Le talent, engourdi par la lourde atmosphère des petites villes, s’est réveillé au souffle vivifiant de la science. On connaissait la Suisse pittoresque ; la société, reprenant l’œuvre de Scheuchzer, de Saussure et de Haller, achève le tableau de la Suisse géographique, géologique, botanique et météorologique. Ne se bornant pas à des recherches purement scientifiques, elle a provoqué la réforme monétaire, celle des poids et mesures et