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de la Société helvétique une énumération des espèces suisses du genre Cirsium de M. Naegeli et un catalogue des Chara de M. Alexandre Braun. Le premier de ces deux savans a donné un grand travail sur la classification des algues, et M. Jean Müller une monographie des résédacées.

Dans la partie zoologique, on remarque l’énumération des mammifères, des oiseaux, des reptiles et des poissons de la Suisse par M. Schinz, et celle des mollusques terrestres et fluviatiles par M. de Charpentier. L’infatigable professeur Heer de Zurich a fait connaître les coléoptères vivans de la Suisse ; MM. Meyer-Dûrr et de La Harpe, les lépidoptères ou papillons. On doit aussi à MM. Valentin, Vogt, Koelliker et Neuwyler quelques mémoires d’anatomie comparée.

Je ne saurais passer sous silence un grand travail tenant à la fois de la zoologie et de la paléontologie : il appartient à une subdivision des connaissances humaines que je serais tenté d’appeler la zoologie archéologique. Les lecteurs de la Revue n’ont pas oublié un article de M. Elisée Reclus[1] sur les cités lacustres de la Suisse ; ils se rappellent que dans l’hiver si sec de 1853 à 1854 on remarqua d’abord près de Meilen, sur les bords du lac de Zurich, des pilotis que les basses eaux avaient mis à sec. Entre ces pilotis, on découvrit bientôt des débris de poteries et toutes les traces d’habitations fort anciennes. L’attention une fois éveillée, il se trouva que partout les riverains des lacs et particulièrement les bateliers avaient conservé le souvenir d’indices semblables. Des stations lacustres furent signalées sur les lacs de Neuchâtel, de Bienne, de Morat, de Sempach, de Genève, de Constance, etc. On reconnut ensuite que, dans certaines de ces stations, les pieux n’étaient que des arbres à peine équarris et enfoncés au milieu de grosses pierres accumulées formant au fond de l’eau des monticules auxquels les pêcheurs donnaient depuis longtemps le nom de steinberg. Entre ces pieux, on trouve des poteries grossières et des haches ou des pointes de flèches fabriquées avec les silex de la craie. Dans d’autres stations, les pilotis sont mieux travaillés et enfoncés directement dans la vase. Là on retire du fond de l’eau des poteries plus soignées, des haches en bronze, des épingles, des agrafes, des poignées faites du même métal. Enfin, dans le lac de Neuchâtel, près de Marin, on a découvert une station où toutes les armes et tous les ustensiles sont en fer, métal inconnu dans les ruines des bourgades lacustres appartenant à l’âge de pierre ou de bronze. Les antiquaires ont donc distingué trois âges, celui de pierre, correspondant à une civilisation à peine ébauchée, comme celle des sauvages de la Nouvelle-Zélande ;

  1. Revue des Deux Mondes, 15 février 1862.