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n’est pas rare de le voir varier en un mois de 3 à 4 pour 100. Nous sommes loin d’en être là. Quant à l’Angleterre, les crises y sont aussi plus fréquentes que chez nous, et généralement, quand nous élevons le taux de l’escompte, nous ne faisons que suivre l’exemple qu’on nous donne au-delà de la Manche. Ainsi ce taux, qui est maintenant à 7 pour 100 chez nous, était hier à 8 pour 100 en Angleterre. Par conséquent, si tant est que la liberté des banques d’émission existe dans les pays qu’on nous cite comme modèles, l’Amérique et l’Angleterre, il n’en faut rien conclure, soit pour prévenir les crises, soit pour modérer le taux de l’intérêt ; mais cette liberté est loin d’être ce qu’on suppose. À New-York par exemple, qui est la ville la plus considérable et la plus commerçante de l’Amérique, aucune banque, depuis 1838, ne peut émettre des billets au porteur sans avoir préalablement déposé chez un fonctionnaire qui a le titre de surintendant des banques des valeurs pour une somme correspondante à celle des billets qu’elle veut émettre, et ces valeurs ne peuvent être que des fonds de la Ville de New-York à 5 pour 100 au pair. On a plus tard admis qu’on pourrait y substituer, pour une certaine portion, des obligations hypothécaires. Une fois ces garanties données, les billets sont remis à la banque par le surintendant avec cette estampille : garanti par des fonds publics. Ce n’est pas tout. La loi exige encore que la banque ait en espèces, métalliques 12 pour 100 au moins des billets qu’elle met en circulation ; enfin elle complète toutes ces garanties en déclarant qu’en cas de sinistre.de la banque, le billet au porteur aura un privilège et sera payé avant tout autre engagement. Voilà la liberté des banques d’émission telle qu’on la pratique à New-York ; nous doutons fort que ce soit à cette liberté-là qu’on fasse allusion lorsqu’on cite l’Amérique.

En Angleterre, la liberté des banques d’émission est soumise aussi à beaucoup de restrictions. D’abord, depuis 1835, dans un rayon de soixante-cinq milles de Londres, il n’y a que la Banque d’Angleterre qui ait le droit d’émettre des billets au porteur, et au-delà les banques qui peuvent en émettre, et dont le nombre diminue chaque année, sont soumises aux restrictions imposées par le fameux acte de 1844, c’est-à-dire qu’au-delà d’un certain chiffre, représenté, comme en Amérique, par des valeurs publiques, elles ne peuvent pas émettre une seule bank-note sans en avoir la contre-valeur exacte en numéraire. Ce chiffre, pour la Banque d’Angleterre, est de 14 millions de livres sterling, et il est, pour les diverses banques locales de l’Angleterre, de 7 millions de livres. Cette loi régit aussi les banques d’Irlande et d’Ecosse. Il en résulte que dans ces pays la monnaie fiduciaire qui n’est pas représentée