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khanat de Balkh) et la Sogdiane (khanats de Bouckhara et de Samarkande), qui puissent répondre aux données du problème. Au-delà, c’est de nouveau le désert, et, comme à l’est, les populations appartiennent de toute antiquité à la race touranienne ou mongole.

C’est là en effet, dans les anciennes Bactriane et Sogdiane, que nous amènent toutes les inductions que l’Avesta et le Véda nous permettent de former sur le pays d’origine de notre race. C’est là que nos ancêtres à tous sont nés à l’histoire. D’où venaient-ils quand ils ont commencé à se sentir vivre ? C’est le secret de Dieu. De nos jours, ces contrées sont peu connues, inhospitalières, dangereuses. À peine quelques rares voyageurs ont osé jusqu’à présent s’aventurer au milieu des tribus farouches qui ont remplacé nos pères ; mais il n’en sera pas toujours ainsi, et en attendant les travaux des explorateurs la science poursuit en Europe même des recherches qui aplaniront leurs efforts. Dans son ouvragé sur les langues indo-européennes, M. Pictet a déterminé avec beaucoup de sagacité la position relative que devaient avoir au sein de l’agglomération aryenne primitive les branches destinées à devenir plus tard les peuples indo-européens. Si l’on excepte les Iraniens ou anciens Bactro-Médo-Perses, que, dans l’opinion très fortement motivée de M. Spiegel, il fait trop remonter vers le nord, on ne peut que souscrire à ce groupement idéal. Qu’on imagine une ellipse dont le foyer oriental soit formé par la Bactriane et traversé par le cours supérieur de l’Oxus : deux lignes, tirées du foyer, d’abord parallèles ou même confondues, puis bifurquant l’une au sud-est, l’autre au sud-ouest, représenteront le groupe hindou-iranien ou sanscrit-zend qui s’étendra vers l’Indus et le Gange d’un côté, de l’autre vers la Perse et la Médie. Une ligne droite, tirée dans la direction de l’ouest lointain, désignera la migration celte, celle qui ira le plus loin vers l’occident et ne s’arrêtera que devant l’Atlantique. Entre celle-ci et les deux premières se dessinera l’essaim gréco-latin ; au-dessus de la ligne celtique, remontant vers le nord, il faut tracer la ligne germano-Scandinave, plus haut encore la ligne lithuano-slave. L’éventail est complet. Il n’est pas au monde de foyer d’émission humaine plus intense que celui-là et moins près de s’éteindre. Depuis trois siècles, on dirait même qu’il a pris un nouvel essor. Il avait déjà peuplé les Indes, l’Iran, l’Asie-Mineure et l’Europe : depuis il a envahi l’Amérique, entamé l’Afrique, de nos jours il arrive en Australie.

Je me suis toujours demandé, et chacun se demandera sans doute, à la vue de ce prodigieux rayonnement, s’il n’y avait pas eu dès les premières migrations quelque circonstance de nature à favoriser et à développer ce don d’expansion au loin et au large qui