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par une motion de M. Pakington à la chambre des communes d’Angleterre, proposant pour les colonies, parmi lesquelles il comprenait les sept îles, le droit d’envoyer des députés au parlement britannique. Cette motion coïncidait avec une pétition que le lord haut-commissaire essayait de faire signer dans les îles pour demander l’annexion aux domaines directs de la reine. Dans sa séance du 20 juin (2 juillet) 1357, le parlement ionien, sur la proposition de M. Lombardos, protesta par un vote unanime contre ces manœuvres, proclama le désir d’union au royaume de Grèce, et ordonna une enquête sur le fait de la pétition comme inconstitutionnelle et formant un délit de lèse-nation.

Un an après, l’indiscrétion d’un employé du ministère des colonies à Londres rendit publiques les deux dépêches du lord haut-commissaire sir John Young, adressées à M. Labouchère et à sir Edward Lytton Bulwer, en date du 10 juin 1857 et du 14 juillet 1858. Ces deux dépêches reconnaissaient l’unanimité et l’ardeur du sentiment grec dans les îles méridionales, et contestaient seulement qu’il fût aussi développé à Corfou et à Paxo. Sir John Young ; proposait donc à son gouvernement de céder Céphalonie, Sainte-Maure, Ithaque, Zante et Cérigo au royaume de Grèce, et de garder Corfou et Paxo, en faisant de ces deux îles une colonie anglaise. À peine les dépêches du haut-commissaire étaient-elles connues, que les députés de Corfou se réunissaient pour déclarer « qu’interprètes des vœux et des désirs du pays, et témoins de l’amertume générale causée par ces documens, ils remplissaient un devoir sacré en démentant formellement les sentimens attribués à leurs concitoyens, et qu’ils élevaient de nouveau la voix, comme ils l’avaient fait le 20 juin 1857 au sein de l’assemblée, déclarant une fois de plus que le seul désir des habitans de Corfou était d’être réunis à la Grèce affranchie. » Quelques jours après, les conseillers provinciaux de Corfou dans une séance extraordinaire, presque en même temps aussi les députés et le conseil municipal de Paxo protestaient de la même manière.

C’est sur ces entrefaites qu’eut lieu la mission de M. Gladstone, dont l’envoi prouvait à lui seul combien le gouvernement anglais tenait pour sérieuse l’agitation de l’opinion publique aux Iles-Ioniennes. L’éminent homme d’état qui occupe aujourd’hui le poste de chancelier de l’échiquier visita toutes les îles pour s’instruire de la situation des esprits. Partout la population se porta en masse à sa rencontre, criant : « Vive l’union ! » Partout les conseils municipaux, les députés, le clergé, lui présentèrent des adresses demandant la cessation du protectorat britannique et la réunion des îles à la Grèce. M. Gladstone ne put pas rencontrer dans toute sa tournée