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On assure que cette transaction coûte beaucoup à un homme tel que M. Frère-Orban, qui voulait se retirer à tout prix, et pour lequel le pouvoir ne saurait avoir d’attrait que s’il est une force et un moyen d’agir. Cette position doit être attribuée à l’équilibre singulier où sont arrivées dans la chambre des représentons les voix catholiques et les voix libérales. Chez nous, ces deux partis ne se balancent guère avec une exactitude approchante qu’à l’Académie française ; mais catholiques et libéraux ne se mesurent dans notre académie qu’à armes courtoises. Il est même bon pour l’intérêt de nos séances de réception qu’un directeur voltairien ait à répondre à un récipiendaire catholique, comme on l’a pu voir le jour où notre excellent collaborateur M. de Carné a pris son fauteuil et a fourni à ce vieillard si vert et si vivant qui se nomme M. Viennet l’occasion non-seulement d’adresser à la Revue des Deux Mondes un compliment dont nous le remercions de bon cœur, mais de soutenir avec un sens très ferme et un esprit très alerte les doctrines qui ont fait l’unité de son honorable et originale carrière. e. forcade.



ESSAIS ET NOTICES.




LES ELECTIONS DE 1789.


le Génie de la Révolution, par M. Ch.-L. Chassin ; tome Ier. Les Elections de 1789, d’après les brochures, les cahiers et les procès-verbaux manuscrits.. 1 vol. in-8o. Pagnerre.

On n’étudiera jamais trop 1789. Les dramatiques péripéties de notre histoire révolutionnaire frappent davantage l’imagination, mais c’est en 1789 et surtout dans les premiers mois de cette année mémorable qu’il faut rechercher les véritables titres de la société moderne. Un volume vient de paraître sur ce sujet, fruit de longues et patientes recherches. Je partage fort peu les opinions de l’auteur, qui est trop révolutionnaire pour moi ; mais je rends volontiers hommage à son travail. Il a, dit-il, examiné un à un, aux archives nationales, les cent soixante-seize registres in-folio qui contiennent la copie authentique de toutes les pièces relatives aux élections de 1789. C’est assurément là une œuvre méritoire. Je regrette seulement que M. Chassin ait porté dans ces études un esprit prévenu, et, tout en reconnaissant la peine qu’il a prise, son application, sa sincérité, je ne puis m’empêcher de croire qu’il n’a pas donné aux élections de 1789 leur véritable caractère. En acceptant la plupart de ses faits, je conteste ses jugemens.

Passons sur les trois premiers chapitres, qui traitent des préliminaires des élections. Ce n’est pas en une centaine de pages qu’il est possible de faire bien connaître le prodigieux mouvement qui a rempli les six derniers