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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




14 février 1864.

Qu’y a-t-il dans l’émotion universelle excitée par le conflit qui a éclaté soudainement entre l’Allemagne et le Danemark, si ce n’est le sentiment profond de la fragilité de la paix européenne ? En effet, cette crise met à nu l’impuissance des précautions qui avaient été jusqu’à présent considérées comme les plus sûres garanties du maintien de la paix de l’Europe. Il était reconnu par toutes les grandes puissances que la conservation de l’intégrité de la monarchie danoise était un intérêt de premier ordre pour l’équilibre général. Cette conviction des grandes puissances s’était exprimée dans un acte solennel, dans une des plus récentes conventions de notre droit diplomatique, dans le traité de 1852, qui réglait la succession de la monarchie danoise. L’Allemagne était intéressée dans les arrangemens relatifs au Danemark. Or la constitution actuelle de l’Allemagne a été organisée de telle façon qu’il semble que l’on ait voulu ôter à ce grand pays la possibilité de prendre l’initiative d’une entreprise belliqueuse. Cette organisation met pour ainsi dire la confédération germanique à l’écart du débat des affairés internationales de l’Europe. Dans la pratique, pour simplifier l’expédition : de ces affaires, pour assurer l’effet des décisions auxquelles elles donnent lieu, les deux grandes puissances allemandes, la Prusse et l’Autriche, étaient considérées comme les organes naturels de la confédération : on croyait avoir l’Allemagne quand on avait la pensée et l’aveu de l’Autriche et de la Prusse, et si la confédération, par son organisation, paraissait vouée à la paix, la Prusse et l’Autriche ne semblaient pas moins liées par leurs intérêts à une politique conservatrice. La Prusse et l’Autriche avaient signé le traité de 1852 comme l’Angleterre, la France et la Russie. Il se trouve cependant aujourd’hui qu’aucune des garanties que l’on croyait avoir données à la paix dans l’arrangement des affaires du Danemark ne tient plus. On découvre tout à coup que, dans la transaction des affaires générales de l’Europe, l’Autriche et la Prusse n’ont plus exclusi-