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Faut-il y renoncer ? Personne n’y songe, on ne songe qu’à diminuer les risques ; il faut faire de même pour les dépôts en comptes courans, il faut s’attacher à en conserver, à en développer l’usage en cherchant à en atténuer les périls. Les banques de dépôt devraient être en France ce qu’elles sont en Amérique, en Écosse et même déjà un peu en Angleterre, les caisses d’épargne du pays.

D’après un travail économique récemment publié, il sort chaque année du sein des populations ouvrières, sous forme d’épargne, une somme plus ou moins considérable qui est placée soit entre les mains du gouvernement, où elle devient souvent un embarras, soit autrement, mais toujours d’une façon peu profitable au crédit. Cependant ces mômes classes ouvrières ne trouvent point de crédit lorsqu’elles en ont besoin, et on en concluait justement qu’avec un meilleur emploi de leurs épargnes elles pourraient se le procurer à elles-mêmes. La conclusion est parfaitement juste ; mais la première chose à faire pour arriver à un tel résultat, c’est d’abord que l’on considère les banques de dépôt comme des caisses d’épargne. Cela ne veut pas dire que, même avec ce moyen poussé aussi loin qu’on peut l’imaginer, on aura toujours le capital à bon marché. Le capital est comme toutes les marchandises, dont le prix dépend du rapport de l’offre et de la demande, et comme on ne peut répondre qu’il ne sera point quelquefois plus demandé qu’offert, on ne peut pas répondre davantage qu’il ne variera pas de prix, on peut même dire que de toutes les marchandises le capital disponible est celle dont le prix doit le plus varier, car c’est celle dont l’usage est le plus général et le plus indispensable. On peut à la rigueur se passer d’une certaine étoffe et la remplacer par une autre équivalente : on ne peut pas se passer du capital disponible, qui est l’âme de toutes les transactions, et quand il manque, il n’a pas d’équivalent, il faut le payer cher. On a beaucoup dit que pendant un grand nombre d’années en Angleterre le loyer du capital ou taux de l’intérêt, ce qui est la même chose, n’avait guère varié qu’entre 2 et 3 pour 100, et qu’il s’était tenu à 4 pour 100 à la Banque de France pendant plus de trente ans. Cela est possible, mais on aurait tort de conclure du passé en faveur de l’avenir. Autrefois, en France surtout, les opérations commerciales étaient très limitées, l’ensemble du commerce extérieur représentait, il y a seize ans, en 1846, 2 milliards 437 millions, et le mouvement des opérations de la Banque de France et des banques départementales se résumait dans le chiffre de 2 milliards 299 millions. En 1862, l’ensemble du commerce extérieur a été de 5 milliards 949 millions, et le mouvement des opérations de la Banque de 7 milliards 783 millions ; il n’est donc pas étonnant qu’autrefois le taux de l’escompte