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Ce n’est là cependant que le côté matériel et jusqu’à un certain point secondaire des affaires du Mexique telles qu’elles apparaissent aujourd’hui. Au fond, cette pacification tient évidemment à la solution d’un problème bien autrement grave, d’un ordre tout moral et politique, celui de la régénération intérieure du Mexique, et c’est ici surtout que s’élève cette grande et pressante question de savoir jusqu’à quel point la France peut prêter son nom, sa protection, ses garanties, dans quelle mesure elle peut concourir à la reconstitution mexicaine, sans aller au-delà de tous les intérêts de sa politique. Malheureusement les Mexicains ont parfois des façons d’interpréter les événemens de leur histoire qui ne servent pas à éclaircir les difficultés du moment ni à les résoudre, et qui doivent quelque peu étonner nos zouaves. Lorsque l’assemblée des notables de Mexico se réunissait au mois de juillet 1863, la commission chargée de proposer le rétablissement de la monarchie trouvait le moyen d’illustrer l’intervention de ce commentaire au moins bizarre : « En fixant sa vue, disait-elle, sur la série d’admirables événemens dont la réalisation a été nécessaire dans l’ancien et dans le Nouveau-Monde pour que nous soyons réunis aujourd’hui sous la garantie d’une nation puissante, afin de délibérer tranquillement sur la future constitution d’un gouvernement qui assure notre félicité, l’imagination est confondue, et elle cherche en vain dans les débiles ressources de la sagesse humaine la solution de ce problème que contemplent les nations de la terre pleines d’étonnement... Un moment de réflexion suffit pour convaincre que le sort du Mexique est intimement lié à la chute de Louis-Philippe, à l’établissement de la république française de 1848, au coup d’état de 1851, à la création de l’empire français qui en fut la conséquence, à l’élévation au trône par le suffrage universel du grand Napoléon III, aux glorieux triomphes de la France en Crimée, en Italie, à la paix inopinée de Villafranca, à la scission des États-Unis, qui se dévorent sans pitié, enfin aux attentats de tout genre dont s’est rendue coupable la féroce démagogie mexicaine en secouant le frein salutaire de toute morale, et en foulant aux pieds les principes de ce droit auquel rendent hommage toutes les sociétés civilisées. Pensez-y, messieurs, ici il n’y a ni hyperbole ni paradoxe. Qu’un seul de ces événemens ne se fût pas réalisé, ou qu’il ne se fût pas réalisé au point précis du temps où chacun s’est placé dans l’histoire, qu’il se fût vérifié avant ou après dans ses relations avec les autres, la cause du Mexique était perdue sans remède, et elle était perdue pour toujours. Ainsi Dieu pousse les rois et les peuples, etc. » Je dis simplement d’abord que le bon sens souffre quelquefois de voir ces philosophies portées au bout de l’épée de nos soldats, et l’histoire