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un spirituel orateur de l’opposition ; elle a laissé les autorités locales maîtresses d’annoncer cette anticipation du scrutin, ou bien de se dispenser de la faire connaître, et elle a souvent favorisé, avant le rendez-vous donné aux électeurs, la formation des bureaux, dont ils sont intéressés à surveiller les premières opérations. » Quoi qu’il en soit, sans faire le procès aux intentions, et même, si on peut le désirer, en leur rendant presque toujours justice, il y a lieu de mesurer tristement, non-seulement quelle pourra être pour l’avenir, mais aussi quelle a été dans les dernières élections la portée de cette substitution des convenances aux ordonnances. Une fois l’exemple donné, comment ne serait-il pas suivi ? Et quand on sait que toutes les exigences des lois paraissent presque toujours des gênes à ceux qui sont chargés de s’y soumettre, faut-il s’étonner que dans un si grand nombre de communes les maires se soient mis à l’aise avec les formalités dont ils se sont faits eux-mêmes les juges? Du moment où il est reconnu qu’il y a des dispositions sur lesquelles il faut se montrer tolérant, y en a-t-il d’autres sur lesquelles il faudrait se montrer rigoureux ? Il est dès lors facile de comprendre pourquoi, dans la langue parlementaire du jour, toutes ces monotones redites des protestations ont reçu la qualification de petits faits.

Maintenant que nous avons suivi étape par étape cette route escarpée et sans bords, côtoyé tant de précipices et mesuré tant d’abîmes, voyageur aguerri plutôt qu’alarmé par les périls reconnus du voyage, nous nous garderons bien de pousser un cri de découragement. Nous savons ce qu’il en coûtera pour aplanir de tels obstacles, qui peuvent rebuter les plus fiers courages ; mais nous ne désespérons pas du succès de l’entreprise. Il faut donc se mettre à l’œuvre et ne pas s’en laisser détourner. Les électeurs et les candidats sont exposés à bien des mécomptes, mais leurs espérances doivent survivre à leurs épreuves. Franc jeu pour tous, fairplay, cette devise, qui est celle des élections d’Angleterre, ne peut guère, il est vrai, être invoquée dans les nôtres ; mais n’est-il pas permis de se rappeler qu’il y a eu un temps où nous nous Fêtions appropriée, et faut-il se persuader qu’elle restera toujours une devise étrangère ? Nous ne nous dissimulons pas la diversité des institutions des deux pays, et nous reconnaissons sans embarras quelles sont les difficultés d’exécution qui résultent du suffrage universel, trop puissant pour supporter aucun contre-poids : nous sommes disposé à tenir compte des avantages que donne à l’Angleterre l’incomparable sécurité de son gouvernement, qui, fort de sa durée, recueille ce qu’il a semé ; mais en dépit du contraste de nos élections avec celles du peuple anglais, nous n’en pouvons pas moins invoquer les élections de