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dans une consultation signée par les jurisconsultes les plus autorisés, il n’en fallut pas moins se tenir prudemment sur la réserve. Il est vrai qu’en réduisant les comités à moins de vingt personnes, il n’a pas été défendu de s’en servir; mais en dehors des grandes villes les comités, ne pouvant se passer de correspondans et s’exposant ainsi à devenir, par le nombre de leurs membres, des associations prohibées, il est facile de comprendre que le plus souvent les électeurs ont été tentés d’appliquer la maxime : « dans le doute, abstiens-toi. » Les réunions ne pouvaient prétendre à être traitées plus favorablement que les comités, et malgré les précautions offertes par les candidats, dont quelques-uns s’engageaient même à consulter les convenances des commissaires de police afin d’obtenir leur présence, sauf de très rares exceptions, dont certaines villes comme Paris ont eu le privilège, elles furent rigoureusement interdites. Il n’y eut qu’en faveur de certains candidats qu’elles s’organisèrent quelquefois sous une forme particulièrement appropriée ii l’enthousiasme, la forme de banquets, sur lesquels il serait aisé, si nous en avions le goût, d’emprunter aux protestations de quelques candidats d’assez piquans détails.

Le gouvernement est aussi resté fidèle à ses habitudes en continuant de pratiquer le système des candidatures officielles. — On nous demande, avait déclaré à la fin de la dernière session M. le président du conseil d’état, si nous renonçons aux candidatures officielles. Une fois pour toutes, je réponds : Non, nous n’y renoncerons pas. — Le ministre de l’intérieur étendit en quelque sorte la portée de cette déclaration en écrivant aux préfets, comme s’il s’agissait du renouvellement d’un vote dynastique, que les élections étaient pour la France une nouvelle occasion d’affirmer devant l’Europe les institutions qu’elle s’était données. Pour compléter cette révélation, il leur recommandait de faire savoir aux électeurs, en désignant les candidats qui leur seraient présentés, quels étaient les amis ou les adversaires plus ou moins déguisés de l’empire. Donnant lui-même l’exemple, il descendit comme en champ clos pour prendre à partie l’homme d’état appelé par l’empereur l’historien illustre et national, qui avait consacré son éminent talent à rendre immortel le souvenir des grandeurs et des victoires de Napoléon, et qui, après douze ans de retraite, se décidait par son serment à reconnaître le second empire. La circulaire de M. de Persigny, adressée au préfet de la Seine, fut un manifeste répandu dans tous les départemens et qui donnait le ton de la politique agressive. Un tel signal était pour les préfets un mot d’ordre qui les trouva presque tous disposés à obéir. Il s’agissait d’abord de mettre debout tout le personnel des fonctionnaires, et les instructions les plus énergiques leur furent