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loin de constituer une menace un peu sérieuse pour leur état financier, deviennent au contraire la manifestation d’un utile esprit de recherche et la garantie d’une exploitation progressive.

Dès l’origine, on aurait pu marquer sur la carte plusieurs endroits où de tels chocs se produiraient vraisemblablement de réseau à réseau. S’il y avait en particulier un point où la symétrie première semblait devoir être menacée un jour ou l’autre, c’était dans la zone méridionale qu’il fallait le chercher. Seule des six grandes exploitations françaises, la compagnie du Midi n’a pas vers la capitale une issue qui lui appartienne. Sous ce rapport, sa position ne ressemble même pas à celle de l’ancien Grand-Central, qui se plaignait si haut de son isolement, mais qui, moins éloigné de Paris, avait pu afficher un moment l’ambition de s’y ménager un accès par Tours et Vendôme, entre les lignes de la compagnie d’Orléans et celles de la compagnie de l’Ouest. Quant au Midi, force lui est de renoncer à toute illusion semblable. Pour ses rapports avec le centre immense d’où part et où converge presque toute la circulation nationale, je veux dire avec Paris, il dépend de deux autres compagnies, celle d’Orléans et celle de Lyon. À tout prendre, le sillon ferré parcourant en sens divers les plaines qui vont toucher le pied des Pyrénées a pourtant, lui aussi, ses conditions d’autonomie, ses garanties d’indépendance. Ce qu’il peut regretter du côté du nord et de l’est, il en trouve la compensation du côté du sud, ou du moins il la trouvera le jour où seront desservies les voies qui doivent l’unir aux chemins espagnols à l’une et à l’autre extrémité de la muraille pyrénéenne. Que son essor se déploie à travers les Pyrénées, et il entre dans la plénitude de son action. C’est préoccupé sans doute de cette perspective que le Midi conçut l’idée d’élargir ses issues sur le sol même de la France, et tout à la fois vers les départemens du centre et de l’ouest, c’est-à-dire du côté de la compagnie d’Orléans, et vers ceux du sud-est, c’est-à-dire du côté de la compagnie de Lyon, prétention à double tranchant, quoiqu’elle n’atteignît au vif que la compagnie d’outre-Rhône. D’autre part, on ambitionnait une voie directe sur Marseille à l’aide d’une ligne partant de Cette, longeant le littoral par Aigues-Mortes, Saint-Louis, Bouc, les Martigues, et raccourcissant le trajet de 45 kilomètres ; de l’autre, on demandait à souder le faisceau méridional avec celui du centre au moyen d’un chemin de fer se détachant à Rhodez du groupe des concessions appartenant à la compagnie d’Orléans pour se diriger sur la Méditerranée par Milhau, Sainte-Affrique et Montpellier.

Cette combinaison, qui pouvait paraître hardie, séduisante même au premier abord, quoique très hasardeuse dans son principal objet,