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les vicissitudes inévitables de cette combinaison se seront produites, sur les conditions et les garanties de notre liberté. Notre jeune session législative est encore dans les broussailles de la vérification des pouvoirs. Jusqu’à présent même, la discussion n’a point encore abordé les élections qui semblent devoir être contestées avec le plus d’éclat. Les intéressantes protestations abondent, munies de pièces curieuses. Nous citerons celle des électeurs de Perpignan à propos de l’élection de M. Isaac Pereire, celles de M. de Mornay, de M. Lefèvre-Pontalis, etc. Il y aura là tout un ordre de documens qui, joint aux débats de la chambre sur la vérification des pouvoirs, fournira les matériaux d’une page instructive et piquante de l’histoire contemporaine. Nous remarquons avec plaisir que des esprits curieux et libéraux s’occupent déjà de cette portion de notre histoire, et en recueillent pour ainsi dire les notes dans d’intéressantes publications qui seront plus tard consultées avec fruit. Déjà le mouvement électoral de cette année a été raconté de la sorte ; il y aura lieu de compléter les volumes publiés à ce sujet par M. Ferry et un spirituel écrivain anonyme, lorsque les protestations envoyées à la chambre seront passées par l’épreuve de la discussion contradictoire. Sur les données de ces premiers travaux, grâce au répertoire des faits qu’ils contiennent, il sera permis ensuite aux publicistes de juger avec ensemble et d’un peu haut cette grande question de l’action administrative en matière d’élection, qui altère évidemment le régime constitutionnel en France, puisqu’elle compromet, à l’origine même du pouvoir législatif, le principe de la division des pouvoirs.

La vie parlementaire recommence à la fois sur plusieurs points de l’Europe. La session espagnole est ouverte ; mais la politique parlementaire espagnole est tellement concentrée dans les questions de personnes, qu’elle finit par devenir pour les étrangers ou fastidieuse ou absolument inintelligible. L’ouverture des chambres prussiennes offre assurément un plus vif intérêt. Les élections ont ramené dans la seconde chambre prussienne une majorité libérale, et le roi, si l’on en juge par son discours d’ouverture, ne paraît pas se départir des idées d’organisation militaire qui l’ont mis en lutte avec la représentation du pays. Les élémens du conflit qui paralyse la Prusse plus encore qu’il ne la trouble subsistent donc. Il faut s’attendre à voir se prolonger à Berlin la situation déplorable dont la durée étonne et attriste l’Europe. Existe-t-il quelque moyen de vaincre l’obstination de la couronne, ou bien l’entêtement du roi et de ses ministres pourra-t-il parvenir à lasser la patience du peuple prussien ? La suite de la session nous apportera la réponse à ces questions. Ne traitons pas cependant avec trop de dédain les misères de la politique prussienne. M. de Bismark, après la dissolution de l’ancienne chambre, avait jugé convenable d’emprunter à notre législation de la presse le régime des avertissemens, si commode pour le pouvoir. Nous avons remarqué que dès l’ouverture de la session le ministre prussien a soumis à la chambre la question des journaux. Cet appel au pouvoir législatif dans une question qui est naturellement de son