Page:Revue des Deux Mondes - 1863 - tome 48.djvu/435

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

entre les rochers, et l’on se trouve bientôt en face d’un des spectacles les plus extraordinaires de la nature. À l’extrémité du lac se montre la mer, dont il n’est séparé que par un banc de sable appelé la Barrière (Bar). Cette lisière de sable fin a environ deux cents pas de largeur, et elle ferme toute communication entre la mer et le Lobe-Pool. « En se promenant sur la barre, on a devant soi l’Océan, masse verdâtre et obscure avec une frange d’écume ; derrière soi le lac, qui chemin faisant a un peu changé de couleur : il est maintenant d’un rose glacé d’argent. Ce contraste est saisissant : ici le calme ou tout au plus un léger frémissement de l’onde, là le sombre abîme où s’engendrent les tempêtes. Le Looe-Pool n’est pourtant pas toujours aussi tranquille. Il arrive souvent, surtout pendant l’hiver, que la masse des eaux descendant des collines surpasse de beaucoup celle que laisse filtrer en tout temps dans la mer la barre de sable. Le lac grossit, déborde, arrête le travail des moulins, inonde les chemins et la partie basse de la ville. En pareil cas, la corporation d’Helston se rend chez le maître du manoir (M. Rogers), et, selon une très ancienne coutume, lui présente une bourse de cuivre contenant trois demi-deniers ; elle demande en même temps la permission de couper la barre. Ceci fait, les ouvriers se mettent à l’œuvrer on ouvre dans le sable une petite tranchée qu’élargit bientôt la violence du courant, et un immense fleuve se précipite dans la mer, non sans livrer un combat terrible avec les puissantes vagues marines qui le repoussent. C’est, dit-on, une scène étrange et grandiose, surtout au clair de lune, que le passage tumultueux de toutes ces eaux. La nouvelle en arrive jusqu’aux îles Scilly, apportée en quelque sorte par la couleur rouge de la mer. La barre coupée se reforme et se répare au bout de quelques jours au moyen des sables que chassent les vagues de l’Océan, surtout par les temps de tempête. La mer, ainsi que la liberté, se limite elle-même.

Revenons à la mine de Dolcoath, Les ouvriers de ces grandes entreprises se partagent en deux ordres de travaux bien distincts, les travaux souterrains, underground works, et les travaux qui s’exécutent à la surface du sol, ground works. Occupons-nous d’abord des premiers, qui présentent un intérêt particulier à cause des dangers qui s’y attachent. La mine de Dolcoath a deux mille pieds de profondeur. Elle se développe sur un espace de trois quarts de milles carrés, et l’une de ses branches passe par-dessous le chemin de fer. Il n’y en a guère de plus profondes, mais il y en a de beaucoup plus étendues ; les consolidated mines (mines consolidées) se prolongent sous terre à soixante-trois milles ! On descend dans l’intérieur le plus souvent par des échelles fixées aux parois de la fosse ; à Dolcoath pourtant et dans quelques autres mines, il y a une man-engine