Page:Revue des Deux Mondes - 1863 - tome 47.djvu/969

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Entre l’Irlandais et l’Anglais, entre le catholique et le protestant, l’égalité devant la loi est complète. Si cinq fonctions sont interdites aux catholiques, — celles de régent du royaume-uni, de lord-lieutenant d’Irlande, de chancelier d’Angleterre, de chancelier d’Irlande et de président de l’assemblée générale de l’église d’Ecosse, — ce sont des exceptions qui, sauf une, se justifient par la nature des attributions, des exceptions qui, comme on dit, confirment la règle. Partout où s’étend l’action de l’état, l’égalité pratique fait des progrès. Après plusieurs lords-lieutenans qui ont gouverné dans un esprit de justice et de réparation, l’Irlande possède aujourd’hui un vice-roi qui est de tous les hommes d’état anglais le plus dévoué à l’Irlande, et dont on peut dire, comme des Fitz-Gerald : « Plus Irlandais que les Irlandais[1]. »

Il faut aussi le répéter : en matière fiscale, l’Irlande est traitée équitablement et plutôt favorisée. Sauf l’income tax, et, si l’on veut, les patentes, tous les impôts perçus par l’état sont des impôts de consommation : douanes, excise, timbre et postes. L’Irlandais paie ainsi par tête infiniment moins que l’Anglais. Toutes les sommes perçues en Irlande y sont dépensées, et au-delà. Si l’Angleterre ruine l’Irlande, c’est assurément sans profit pour ses finances. En même temps la propriété est fortement imposée pour le soulagement de la misère; la taxe des pauvres est de tous les impôts fonciers et locaux le plus considérable. Depuis l’établissement de cette taxe en 1846 jusqu’en 1861, on a dépensé 13,800,000 livres sterling (345 millions de francs). Comme la taxe est locale et s’élève avec la misère, elle a dans certains lieux et en certaines années dépassé le montant du revenu de la propriété. Il a été en outre établi des dispensaires où l’on donne des secours et des remèdes gratuits, et qui coûtent annuellement, en dehors de la dépense publique pour les hôpitaux de comtés, plus de 100,000 livres sterling (2,500,000 francs). Enfin l’éducation primaire est gratuite, et la somme dépensée par l’état pour les écoles nationales a monté en 1861 à 350,000 livres sterl. (8,750,000 francs).

Au moment de la grande famine, le gouvernement du royaume-uni a donné ou prêté aux comtés d’Irlande des sommes suffisantes pour entretenir pendant plus d’une année 3 millions de personnes. Depuis, des fonds importans sont annuellement votés pour servir de prêts à l’agriculture et d’encouragement aux améliorations agricoles. D’autres sont également alloués en faveur des pêcheries, et pour aider les marins à se procurer des engins de pêche. Par instans, l’Angleterre a su dominer ses préjugés religieux et sociaux :

  1. Lord Carliste.