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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




30 septembre 1863.

La grande campagne diplomatique entreprise cette année en faveur de la Pologne est maintenant achevée. Il dépendait du prince Gortchakof de laisser en quelque sorte reposer le débat en donnant à son dernier mot un tour modéré et conciliant. Il lui a plu au contraire de le rompre sur le ton du défi. Tout le monde, les partisans de la paix quand même aussi bien que ceux qui veulent qu’il soit demandé compte à la Russie du droit public qu’elle viole et de l’humanité qu’elle outrage, a le sentiment que les choses ne peuvent en rester là. L’hiver était dans cette discussion un arrêt forcé, une sorte de trêve, qu’on eût pu mettre à profit pour l’élaboration d’une transaction ; l’imprudent et faux orgueil moscovite n’a point souffert qu’il en fût ainsi. L’avenir dira si ceux qui ont pris une attitude si altière sont de force à la soutenir.

Personne n’a lieu d’être satisfait de la façon dont le débat diplomatique s’est terminé. Nous n’avons point la prétention de deviner les phases ultérieures que parcourra la question polonaise ; mais le sentiment général de malaise créé par le triste résultat de cette campagne est un premier et grave indice des embarras auxquels tout le monde peut s’attendre. Tout demeure pour l’opinion publique, aussi bien que pour les gouvernemens, incertitude, anxiété, confusion. Personne ne distingue nettement sa voie ; chacun est à la merci des incidens, s’abandonne au courant fatal des choses. On ne voit pas de système, pas de conduite tracée ; pour nous Français, une telle situation est un supplice. Une note du Moniteur nous instruisait, il y a trois jours, de la façon dont s’exerce chez nous l’initiative politique suivant l’esprit de nos institutions. « Sous le régime actuel, disait eu journal taciturne, c’est du souverain qu’émane la pensée qui dirige les affaires. Le ministre n’est responsable que de l’exécution. » La distinction est fondée sans doute, et nous est fort utilement rappelée ; mais le public