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et quand revinrent les Bourbons en 1815, elle n’avait rien fondé qu’ils ne pussent facilement détruire. Les Bourbons firent pour l’instruction publique ce qu’ils firent pour tout ce qui pouvait réveiller les. sentimens de liberté et de gloire nationale. Ils ne conservèrent que ce qui pouvait favoriser la superstition et la servilité. Les collèges furent confiés aux jésuites. On éloigna, de Naples la plupart des étudians en créant dans les provinces de mauvaises facultés, dont la plupart n’existaient que dans les statistiques ministérielles. Ce n’est pas que certains ministres napolitains ne cherchassent à se donner à l’étranger un vernis de libéralisme. Ainsi on appela de France, où il vivait en exil, Melloni, pour faire un cours de physique; mais la chaire ne fut jamais créée. On le nomma directeur de l’observatoire du Vésuve, mais on le laissa manquer des instrumens nécessaires, et quand, de guerre, lassé, il les eut achetés à ses frais, on fit mille difficultés pour lui en rembourser le prix. Le désordre était partout, et il n’y avait plus qu’une seule chose organisée dans les écoles, la police. Cette décadence des institutions universitaires profita aux établissemens d’instruction libre, et on vit alors à Naples des privat-docent qui réunissaient jusqu’à deux et trois cents élèves. Le gouvernement toléra cet enseignement en le surveillant de près, et en tira quelquefois vanité; mais, s’il y eut parmi ces professeurs libres, des hommes distingués, comme Savarese, Pisanelli, Palmieri, la plupart ne s’appliquèrent qu’à gagner de l’argent en préparant le plus vite possible leurs élèves à des examens dérisoires.

La révolution de 1860 a donc trouvé dans les Deux-Siciles le niveau des études très abaissé, mais tout de suite on se mit à l’œuvre pour le relever. Sur le continent comme en Sicile, on s’est empressé de fonder des écoles élémentaires, et on ne s’est arrêté que devant la difficulté de trouver des instituteurs qui ne fussent pas des bourboniens ou des prêtres hostiles à l’ordre nouveau. On improvisa des écoles normales primaires, on nomma une commission centrale d’inspection, et des inspecteurs, des conseils provinciaux d’instruction, on donna des subsides aux communes les plus pauvres. A la fin de 1861, les provinces napolitaines, qui ont 1,855 communes, n’avaient encore que 1,054 écoles élémentaires fréquentées par 23,5691 garçons et 778 écoles fréquentées par 18,112 filles. Au mois de novembre 1862, elles avaient 1,603 écoles de garçons avec 60,050 élèves et 922 écoles fréquentées par 30,567 filles. Les écoles du soir pour les adultes ont pris surtout un grand développement : le nombre en a été porté de 18 à 911, celui de leurs élèves de 204 à 9,804. L’instruction secondaire n’a pas suivi le même mouvement de progression; c’est qu’elle ne peut s’améliorer qu’à l’aide de professeurs instruits et dressés dans une bonne école normale supérieure.