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à la culture les naturels, en les traitant soit comme esclaves, soit comme des engagés auxquels l’affranchissement serait donné après quatorze ans de service, et auxquels on réserverait une part dans la distribution des terres.

Avant de mettre ce plan à exécution, M. le comte Mole, devenu ministre de la marine, fit explorer la côte orientale de Madagascar. Parmi les explorateurs figurait M. le baron de Mackau, alors capitaine de frégate. Tamatave, Foulpointe, Sainte-Marie, Tintingue et tout le littoral furent visités. La commission d’exploration prit même possession solennellement, en présence des chefs du pays, réunis en kabar, de Tintingue et de Sainte-Marie. Plus tard Saint-Luce et le fort Dauphin furent réoccupés et reçurent une garnison française. Cependant les dures expériences que nous avions faites ne devaient point nous servir. L’expédition de 1821, qui suivit l’exploration dont nous venons de parler, ne fut pas conduite plus prudemment que les précédentes. Elle arriva pendant la mauvaise saison ; on était en plein hivernage. Les maladies attaquèrent les Français avant qu’ils eussent construit les bâtimens .qui devaient leur servir d’abri. La mortalité fut si grande qu’ils durent renoncer à l’occupation de Tintingue, base de toutes leurs opérations. Ils restèrent à Sainte-Marie et se bornèrent à recevoir en kabar à la Pointe-Larré des déclarations d’obéissance au roi de France de la part de plusieurs chefs de la côte est.

Cependant le gouverneur de l’Ile-de-France se préparait à susciter à notre expédition les plus graves embarras. Sir Robert Farquhar était un de ces agens que l’Angleterre trouve toujours à son service, qui s’inspirent de leur patriotisme, prennent résolument l’initiative d’une politique qu’ils jugent utile aux intérêts de leur pays, sauf à se laisser désavouer quand, pour des considérations supérieures, leur gouvernement juge avantageux de le faire. Après les ordres qu’il avait reçus de ne pas considérer comme dépendance de la colonie de Maurice les établissemens français de Madagascar, sir Robert Farquhar imagina d’infirmer les droits de la France par une souveraineté de fait. Il rencontra dans Radama un instrument merveilleusement propre à seconder son dessein.

En 1813, Radama avait succédé à son père, roi des Hovas, qui avait soumis successivement par les armes plusieurs peuplades voisines et grossi le nombre de ses sujets. Radama, actif et ferme, avait l’ambition d’agrandir encore ses états par de nouvelles conquêtes. Sir Robert Farquhar le choisit pour en faire le pivot de toute sa politique contre la France. Il lui envoie un agent de la Grande-Bretagne nommé Hastié, qu’il a initié à ses plus secrètes pensées. Il lui donne pour mission d’entretenir Radama dans le désir d’être seul