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si elle doit aussi s’agrandir aux dépens de la Pologne. » (Dépêche du 10 juillet 1773.)

« …… Sans parler de l’envahissement des faubourgs de Dantzig et des extorsions que le roi de Prusse y a commises, il a enlevé à la Pologne, outre ce qui lui a été donné par le traité du 18 septembre, un territoire peuplé de plus de quarante mille habitans, et produisant des revenus proportionnés. Il a obtenu le consentement de la cour de Vienne en la laissant ajouter Brody à ses propres conquêtes.» (Dépêche du 25 décembre 1773.)


Enfin Catherine est sur le point de se fâcher de ce pillage, et soit dégoût, soit dépit, soit tout cela ensemble, elle déclare ne plus vouloir se mêler de rien.


« Le courrier que le chargé d’affaires d’Autriche a reçu la semaine dernière n’a rien apporté que de relatif à la fixation définitive des limites de la Pologne. — Le plan a été entièrement arrêté avant le départ de M. de Swieten, et le messager n’avait à annoncer que l’approbation de l’impératrice-reine. — Sa majesté prussienne en a immédiatement transmis la nouvelle à Saint-Pétersbourg par un de ses chasseurs, plutôt à titre d’information que pour demander l’avis de cette cour, puisque la tsarine, ainsi qu’on me l’assure et que je le tiens pour indubitable, après avoir en vain tenté de modérer les prétentions de ses deux alliés, a déclaré que, quant à elle, elle était décidée à s’en tenir aux limites posées dans le premier traité de partage conclu à Pétersbourg, et à les laisser fixer leurs frontières à leur guise….. Je ne puis rien dire de certain sur l’étendue des territoires que la cour de Vienne prétend ajouter à son lot primitif. Sa majesté prussienne prend ses frontières sur la Netze, depuis sa jonction à la Warta jusqu’à sa source, d’où il sera facile à votre seigneurie de voir que la Prusse gagne un spacieux territoire comprenant le fameux lac de Goblo, les palatinats d’Inowroclowiez et de Brescia et presque tout le district de Cujavia, à l’ouest de la Vistule. Il est probable que la délégation ne fera pas d’opposition à cette nouvelle usurpation, que la diète et le roi de Pologne en feront peu. Maintenant que les trois cours paraissent avoir atteint leur but respectif, il y a lieu d’espérer que, cette affaire une fois terminée, la malheureuse république, après une série non interrompue de discordes, de troubles, de malheurs qui l’ont bouleversée pendant dix ans, qui lui ont coûté sa liberté, ses plus belles provinces, et tout poids en Europe, pourra pleurer en repos sur ses infortunes, et que du moins sa nullité future la garantira de nouvelles agressions. » (Dépêche du 29 octobre 1774.)


Le repos que M. Harris croyait pouvoir espérer pour la Pologne, et qu’elle avait si chèrement acheté, ne devait pas durer vingt ans, et les nouvelles agressions dirigées contre elle ne devaient avoir d’autre terme que celui de son existence.