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que son esprit fit une de ces excursions dont je parlais tout à l’heure; cet esprit eut conscience à un certain moment de sa position singulière, et vit son corps devant lui étendu sans mouvement sur le lit; « le seul lien qui joignît encore les deux formes semblait être une lumière argentée qui procédait du cerveau; » un être surnaturel qui accompagnait l’esprit de M. Home dans son voyage nocturne lui dit alors : « Le lien qui unit les deux formes viendrait-il à être coupé, vous ne rentreriez plus dans votre corps ; cependant, comme je vous l’ai dit, cela ne sera pas. » — Il faut toutefois avouer, pour être juste, que la théorie du lien fluidique est seulement ébauchée par M. Kardec, et qu’il ne paraît pas y attacher une importance capitale; ce n’est dans l’ensemble de ses conceptions qu’un détail sur lequel nous pouvons glisser pour revenir aux parties essentielles de sa doctrine,

A la mort, l’esprit quitte le corps, mais il conserve son périsprit, cette sorte de corps « éthéré, vaporeux et de forme humaine. » Il se débarrasse de l’enveloppe grossière, mais il en garde une seconde, « comme lorsque nous quittons un vêtement de dessus pour ne conserver que celui de dessous, comme le germe d’un fruit se dépouille de l’enveloppe corticale et ne conserve que le périsperme. » Dans cet état, les esprits peuplent l’espace et vivent autour de nous et au milieu de nous. Ils se transportent partout avec une grande rapidité; ils pénètrent tout sans qu’aucune substance leur fasse obstacle, mais ce sont des êtres « concrets et circonscrits auxquels il ne manque que d’être visibles pour ressembler aux humains. » Ils ont toutes nos perceptions, mais à un degré bien plus subtil que nous. « La vue chez eux est plus perçante, » et elle n’est point, comme chez l’homme, circonscrite dans un organe particulier : « c’est un attribut de tout leur être, ainsi que toutes les autres sensations. » Les esprits sont donc répandus autour de nous, vivent à nos côtés, s’occupant de nos affaires qui ont été les leurs, nous « coudoyant » sans que nous les sentions, du moins à l’état normal; mais on conçoit facilement que la substance du périsprit, qui est d’ordinaire invisible pour nous, « puisse subir des modifications qui la rendent perceptible dans certains cas, comme la vapeur lorsqu’elle est condensée. » Tout est donc disposé, on le voit, pour que les communications entre notre monde matériel et le monde spirituel soient aussi faciles que possible; il n’y a eu besoin à cet effet que du périsprit et de quelques abus de langage.

Mais, objecte un des visiteurs que M. Kardec nous présente dans ses dialogues familiers, de ce que nous concevons une chose comme possible, il n’en résulte pas qu’elle existe. — Sans doute, répond M. Kardec, toutefois « c’est déjà un grand point. » Et dans cette ré-