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Dans beaucoup de marais, les stratiotes croissent tellement serrés qu’ils étouffent toutes les autres plantes, et que bientôt ils remplissent complètement les flaques d’eau. On arrache ces plantes, qui constituent un excellent engrais vert, et on les emploie pour fumer les pommes de terre. Il en faut cinquante charretées par hectare. Le cultivateur les paie très volontiers 3 florins le bateau contenant cinq charretées, et à ce compte il a de l’engrais <à très bon marché.

Le roseau, riet en hollandais, c’est-à-dire le phragmites communis, est aussi l’objet d’une exploitation importante et soignée. Il croît sur les fonds sablonneux sous une profondeur de 50 centimètres à 1 mètre d’eau. Il se développe avec vigueur et se sème de lui-même; mais, partout où les eaux obéissent au flux et au reflux, on profite de la marée basse pour planter le roseau aux mois d’avril et de mai. Avec le pied, on enfonce le rhizome dans la boue, où il reprend facilement. Les frais de plantation sont estimés à 35 florins par hectare; il faut alors attendre trois ans avant de commencer l’exploitation. On coupe les roseaux en septembre quand on veut les avoir avec les feuilles, et après les gelées quand ils sont destinés à couvrir les toits. Le produit d’un hectare est assez élevé; il donne au moins 400 bottes de 1 mètre de circonférence, qui se vendent 9 ou 10 florins les 100 bottes, ce qui fait 80 francs l’hectare, dont il faut déduire une dizaine de francs pour l’enlèvement de la récolte, la mise en bottes, etc. Mais là où le roseau est propre à couvrir les toits, le produit est bien plus considérable, car les 100 bottes valent alors 23 à 24 florins. C’est ainsi qu’en 1858 les 70 hectares du marais de Hensbroek rapportèrent 4,340 florins ou 70 florins par hectare. Les marais de Uithoorn donnèrent encore davantage, 89 florins ou 185 francs par hectare, c’est-à-dire autant que les meilleures terres. On emploie le roseau aux usages les plus divers. Il fournit d’abord aux toitures des constructions rurales une couverture excellente, et qui ne revient qu’à 80 centimes le mètre carré. Le roseau sert ensuite à faire des abris légers et très efficaces, à construite des murs d’argile, à préserver les digues contre le choc des vagues; enfin, arrêtant le limon que les eaux tiennent en suspension, il contribue à élever le niveau des terrains submergés et à transformer des marais en un sol fertile. Ainsi donc il rend aux cultivateurs mille services variés, en attendant qu’il lui crée une terre nouvelle.

Il n’est pas jusqu’au jonc, cette plante considérée partout comme nuisible, dont on n’obtienne un revenu qui égale celui des meilleures prairies. Deux espèces de joncs croissent ici en abondance : le premier, le scirpus effusus (en hollandais rusch), dans les terrains marécageux, le second, le scirpus lacustris (en hollandais bies),