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groupes de couleurs variées très agréables à la vue, mais très nuisibles à la bonne qualité du foin. Ce foin sert en grande partie à la nourriture du bétail de la région sablonneuse qui borde la zone verte du côté de l’ouest. Les cultivateurs des sables viennent l’acheter, parce qu’ils manquent d’herbages. Ce sont généralement des Allemands qui arrivent du Hanovre pour faucher. Ils se répandent par troupes dans les campagnes, où la population manque pour faire un travail qui doit être terminé en quelques jours.

Si l’on veut apprécier au juste tout ce que peut faire la bonne administration des terres, il faut, en quittant le pays de Giethoorn et de Wanneperveen, traverser le Zwarte-Water et visiter le polder de Mastenbroek. Un examen, même superficiel, suffira pour révéler les services que rend une autorité locale chargée de la gestion d’un domaine rural et armée du pouvoir de contraindre chaque propriétaire à participer aux travaux d’amélioration en raison de l’étendue de son bien. Le Mastenbroek est situé entre Zwolle, le Zuyderzée, l’Yssel et le Zwarte-Water. C’est un vaste pâturage de 9,000 hectares. Une partie du terrain est argileuse ; le reste est tourbeux, parce que le polder, endigué au XVe siècle, a été mis à l’abri des inondations de l’Yssel, avant que les eaux de cette rivière aient pu le couvrir tout entier d’une couche de limon. Comme le Mastenbroek ne s’élève guère au-dessus du niveau de la mer, dès que le vent d’ouest la soulevait en la refoulant sur les côtes, le polder ne pouvait plus se débarrasser de ses eaux, et pendant tout l’hiver il était converti en un véritable marais. Pour obvier à ce grave inconvénient, on avait bien établi trois moulins qui pompaient l’eau et la rejetaient au-delà des digues ; mais ces moulins étaient insuffisans, les terres restaient humides, le foin et les herbes étaient de qualité médiocre. Il y a quelques années, l’administration du polder a pris la résolution de ne plus se contenter de la force capricieuse et irrégulière du vent, mais de faire appel à la puissance toujours docile, toujours prête et illimitée de la vapeur : une machine a été montée. Depuis lors, le niveau des eaux est maintenu plus bas qu’autrefois ; les terres sont devenues plus sèches et d’un meilleur rapport ; par suite, la valeur en a rapidement augmenté. Les plus mauvaises, qui se vendaient de 200 à 300 florins l’hectare, en valent maintenant 500, et les meilleures ont monté de 2,000 à 3,000 florins. Le moulin à vapeur a procuré ainsi une plus-value qu’on ne peut estimer à moins de 2 millions de florins. Les frais généraux pour le service de la machine, l’entretien des digues, des chemins, des cours d’eau, etc., sont couverts, année moyenne, par une contribution de 2,50 florins, 1,50 florin ou 80 cents par hectare, suivant la qualité de la terre et sa hauteur au-dessus de l’eau ; mais des événemens imprévus exigent quelquefois des dépenses extra-