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II.

Si, après ce coup d’œil rapide jeté sur la Nord-Hollande, nous traversons le Zuyderzée, nous trouvons le long de cette mer intérieure, depuis Leeuwarden en Frise jusqu’au-delà de l’Yssel, une nouvelle zone de prairies d’un aspect à peu près uniforme, mais de valeur très inégale. Ce sont d’abord les gras pâturages sur fond d’argile du Westergoo, puis, entre le promontoire relevé et boisé du Gasterland et les bruyères de la Drenthe, s’étendent à perte de vue les prés tourbeux des Zevenwolden et de Giethoorn ; viennent ensuite, entre la rivière le Zwarte-Water et l’Yssel, le grand polder de Mastenbroek, et enfin, aux bouches mêmes de l’Yssel, les relais de mer si fertiles du Kamper-Eiland. C’est cette verdoyante ceinture d’herbages que nous allons maintenant parcourir.

Lorsqu’on se dirige de Leeuwarden vers Sneek, on traverse la partie la plus riche du Greidstreek c’est-à-dire de la région verte de la Frise. De tous côtés, dans la campagne, on voit s’élever, à des distances à peu près égales, de petits bouquets d’arbres où s’abrite le frische hiem, ce home du Frison, la vieille ferme des ancêtres. Un fossé entoure le verger au milieu duquel s’élève la maison d’habitation. Large de façade, bâtie en briques, et d’un aspect gai avec ses volets verts, elle est cependant complètement écrasée par l’immense toit de roseaux de la grange à laquelle elle est adossée. Cette majestueuse grange, qui n’est qu’un fenil, puisqu’elle n’abrite jamais que du foin, inspire le respect quand on y entre. Soutenue par de gigantesques poutres de pin de Norvège, elle ressemble au vaisseau d’une église. Tout le long de l’une des parois s’étend l’étable, séparée du reste du fenil par une cloison de bois. Le système d’étable adopté généralement en Frise est désigné sous le nom de grup-stal, et ce nom provient de la rigole profonde et encaissée qui s’étend derrière les stalles des vaches, et qui sert à recevoir et à écouler les déjections. Les animaux, attachés deux à deux dans chaque stalle, n’ont jamais de litière. Le pavement est en brique sur champ, et on leur attache la queue afin qu’ils ne puissent point se salir. Ce système d’étable, auquel on tient beaucoup en Frise, présente en effet un coup d’œil imposant et permet une grande propreté ; mais il offre de sérieux inconvéniens, surtout pour donner l’hiver aux animaux leur ration d’eau et de fourrage. Comme on n’a pas de paille, on fait du fumier en mêlant à l’engrais la terre extraite des fossés, et on le réserve pour les prés à faucher. Sur une ferme de 30 à 35 hectares, on tient d’ordinaire un cheval et soixante-dix bêtes à cornes. On compte à peu près une vache à lait par hectare. On rencontre aussi dans les