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M. Fiorelli regarda une colline, et pensa qu’on y pourrait trouver quelque chose. Il indiqua un endroit que des ouvriers attaquèrent aussitôt à coups de pioche : il en sortit par miracle un tombeau rempli de vases et d’objets précieux. Dès lors le prince ne voulut plus se séparer du docte magicien, et le garda près de lui, en qualité de secrétaire, jusqu’à la fin de sa vie. Il ne put le sauver cependant des persécutions de François II. Certaines protections ressemblent à l’abri des grands arbres touffus qui nous garantissent de la pluie, mais qui attirent sur nous la foudre. Quand le comte de Syracuse écrivit une première épître au jeune roi pour lui conseiller la constitution, on n’osa pas sévir contre l’altesse royale, mais on se vengea sur son secrétaire : la police ferma d’abord une imprimerie qui lui appartenait, puis le chercha partout pour l’arrêter. Le prince, l’ayant accueilli chez lui, le tint caché pendant quelques jours, après quoi, pour le garder jusqu’au dernier moment, il l’accompagna lui-même à bord d’un vapeur en partance. M. Fiorelli passa quelque temps à Florence, revint à Naples quand François II eut remis la constitution en vigueur, et repartit avec le comte de Syracuse après la seconde épître du comte au jeune roi, celle qui lui conseillait l’abdication. François à tomba, Garibaldi devint dictateur de l’Italie méridionale, et confia la direction des fouilles à un romancier français qui lui avait procure des fusils. Le romancier eut le bon esprit de ne pas prendre au sérieux sa nomination; il se contenta de l’honneur, et laissa aux autres toute la peine et tout le profit de la charge; je crois même que ce directeur in partibus ne visita qu’une seule fois les ruines, en simple amateur, si bien qu’après l’établissement du gouvernement régulier, M. Farini rendit à Pompéi, avec M. Fiorelli comme inspecteur des fouilles, l’homme de Naples et du monde qui était le mieux préparé par ses travaux[1] à exhumer la ville morte.

Et maintenant, pour apprécier les premiers résultats obtenus sous la nouvelle administration, prenons le chemin de fer de Naples et arrêtons-nous à la gare de Pompéi. On n’aborde plus les ruines par la rue des Tombeaux, quelques-uns le regrettent en trouvant que l’avenue d’un cimetière formait une entrée convenable à la ville ensevelie; mais on est libre de prendre encore ce chemin, si l’on a de bonnes jambes. Quant à la nouvelle entrée, elle a l’avantage de nous mettre en quelques pas au cœur de Pompéi, c’est-à-dire au Forum. On s’élève d’abord par une montée en pente douce sur le coteau de décombres qui entoure et cache la ville. Cette montée conduit à un tourniquet, un peu étonné de se trouver là, mais fort utile à tout le

  1. Entre autres par sa précieuse publication des inscriptions osques et son plan de Pompéi, remplissant quarante-deux planches, qui, réunies, mesurent une surface de 140 palmes carrés (le palme équivaut à 20 centimètres).