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tient si bien sa place dans notre ciel. Pourquoi a-t-elle des phases? Elle doit être inhabitée; alors c’est un monde privé de vie, un monde qui est à nous, dépendance naturelle de notre domaine, absolument comme ces montagnes inaccessibles, couvertes de neiges éternelles, dont l’utilité ne ressort pas au premier abord, et qui répandent la vie dans nos plaines et nos vallées en y versant les fleuves et les rivières. La lune doit avoir une influence prépondérante sur les vents, sur la température, sur les météores électriques et aqueux, en un mot sur les phénomènes atmosphériques; elle doit agir de même sur les végétaux, sur les animaux et sur l’homme lui-même. En dehors aussi des calculs et des observations météorologiques, la raison dit que la lune a une destination plus étendue que de concourir aux marées de l’Océan.

Déjà l’on sent qu’une objection peut être faite à ce système : ce n’est pas la raison, c’est l’imagination qui assigne à la lune le rôle qu’on voudrait lui faire jouer à la surface de la terre. La raison a besoin de preuves et ne se satisfait pas d’une simple probabilité. Il convient donc d’examiner de près les rapports qu’il peut y avoir entre les mouvemens de la lune et les phénomènes atmosphériques. Quant à l’influence de la lune sur l’homme ou les animaux, il est inutile de s’y arrêter. Il y a longtemps que cette prétendue influence est passée en proverbe, elle a même enrichi la langue française d’un adjectif assez malsonnant pour les inventeurs et les faiseurs de théories. Examinons maintenant les principes énoncés par M. Mathieu (de la Drôme). «Le soleil, dit-il, foyer de chaleur, volatilise les eaux des mers, des lacs et des terres humides, et les fait monter, sous forme de vapeurs ou de brouillards, vers les sommités de l’atmosphère; puis, les nuages étant ainsi formés et suspendus dans les airs, intervient l’influence de la lune, qui tour à tour attire et laisse redescendre l’atmosphère avec ses nuages, de même qu’elle élève et abaisse les flots de l’Océan. Il se produit donc des marées atmosphériques qui mettent en mouvement les couches supérieures de l’air. De l’effet combiné de ces marées et de la chaleur du soleil naissent les vents qui amènent ou entraînent les nuages, par suite la pluie, la neige ou la grêle, enfin tous les météores aqueux. Cette théorie étant admise, il est clair que l’effet ne peut être le même suivant que les phases de la lune coïncident avec le lever ou le coucher du soleil. Telle marée atmosphérique qui se produira vers midi n’aura pas les mêmes conséquences que si elle se produisait à minuit. L’une donnera la pluie, et l’autre le beau temps. En un mot, ce sont les phases qui font le temps suivant l’heure, ou, pour être plus exact, suivant la minute à laquelle elles arrivent; mais il ne suffit pas de consulter le moment précis où doit s’effectuer une seule