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Après ces aperçus sur le genre d’arrangemens que pourraient prendre entre elles les compagnies, après les exemples que nous offre le domaine de l’action privée, viennent l’exercice de l’action publique et le rôle des gouvernemens.


II.

L’action gouvernementale dans la sphère où nous la considérons, et d’où relèvent tous les intérêts affectés par les mouvemens internationaux, plane au-dessus des conditions ordinaires du trafic journalier. Elle est soumise cependant à la même loi que l’action purement privée : sur quelque point qu’elle se dirige, et particulièrement sur la réforme des lois commerciales, elle doit viser aussi à la simplification et à l’unité.

Certes l’uniformité en matière de droit commercial ne saurait être improvisée ; on s’est exagéré parfois cependant les obstacles à vaincre pour s’en rapprocher. En France même, où l’on ne redoute pas d’ordinaire les initiatives hardies en de telles matières, on a, dans une occasion assez récente, un peu trop penché du côté de l’inaction. Il s’agissait d’un projet d’étude sur un code commercial commun à tous les peuples civilisés, projet du à un savant juriste anglais, M. Leone Levy, auteur d’un ouvrage sur les lois commerciales du monde, dans lequel, à côté de l’analyse des lois de la Grande-Bretagne, on trouve les dispositions législatives en vigueur dans cinquante-deux autres pays[1]. Appuyé sur ce travail, dont la publication était contemporaine de la première exposition universelle de Londres en 1851, M. Leone Levy avait commencé, suivant l’usage adopté chez nos voisins, qui pratiquent si largement le droit d’association, par constituer une société dont le siège fut fixé à Edimbourg et qui se donna la mission de provoquer l’élaboration d’un code international. Peut-être le royaume-uni n’était-il pas un sol très propice à une pareille initiative, car, malgré diverses réformes accomplies depuis une dizaine d’années, l’unité y manque absolument dans les lois commerciales, comme elle y manque dans la plupart des autres élémens de la vie civile : l’Angleterre ne pouvait pas citer son propre exemple. Aussi M. Leone Levy crut-il devoir profiter de l’exposition universelle de Paris, en 1855, pour apporter son projet en France. L’expression en fut un peu modifiée. Adoptant une formule moins large, mais aussi moins vague que celle de la société d’Edimbourg, le publiciste anglais se bornait à de-

  1. L’ouvrage est intitulé Commercial Law, its principles and administration, or the mercantile law of Great Britain compared with the codes and laws of commerce of the others mercantile countries.