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se transformer en chaleur. Si nous faisons mouvoir par un effort mécanique une roue à palettes dans un réservoir d’eau, nous échaufferons cette eau ; bien d’autres faits de cette nature apparaîtront. Nous pourrons alors attribuer une généralité absolue au phénomène de la transformation réciproque de la chaleur et du travail ; mais, comme nous nous proposons avant tout d’indiquer rapidement l’ensemble de la théorie nouvelle, nous admettrons dès maintenant que cette généralité est démontrée, et nous poserons sans plus tarder une nouvelle question. Dans la transformation qui nous occupe, y a-t-il un rapport constant entre la quantité de chaleur qui disparaît et la quantité de travail qui apparaît ? On connaît les unités auxquelles ces quantités se comparent ; l’unité calorifique, la calorie, est la quantité de chaleur qui est capable d’élever d’un degré thermométrique la température d’un kilogramme d’eau ; l’unité de travail, le kilogrammètre, est la quantité de travail qui est capable d’élever à la hauteur d’un mètre un poids d’un kilogramme. Quand des calories se transforment en kilogrammètres ou réciproquement, y a-t-il entre ces deux quantités un rapport numérique constant ? Une calorie produit-elle dans tous les cas le même nombre de kilogrammètres ? Un kilogrammètre donne-t-il dans tous les cas le même nombre de calories ?

Si l’on consulte les faits, on y trouve une réponse affirmative. Un nombre considérable d’expériences répétées depuis vingt ans, qui ne seront point toutes citées ici, mais dont les plus mémorables du moins seront mentionnées dans le cours de cette étude, se pressent pour attester la fixité du nombre qui représente l’équivalence de la chaleur et du travail. Une calorie équivaut à 425 kilogrammètres, non pas, on le pense bien, que toutes les expériences aient donné ce nombre exact : ce serait un résultat trop contraire à la pratique des recherches expérimentales ; mais c’est la moyenne que M. Verdet propose d’adopter après avoir examiné une série de travaux assez concordans pour nous donner pleine confiance dans le nombre qui ressort d’une comparaison faite avec soin. C’est le nombre qui devra désormais servir aux calculs industriels et scientifiques. Dès maintenant donc, et sous le bénéfice des confirmations expérimentales, dont les pages qui vont suivre seront l’objet, on peut considérer comme acquise la fixité du nombre qui représente l’équivalence. C’est ce nombre qui est généralement connu sous le nom d’équivalent mécanique de la chaleur.

Passant maintenant de l’ordre des faits à l’ordre des raisonnemens, nous demanderons si on aurait pu concevoir qu’une calorie ne donnât pas toujours le même nombre de kilogrammètres. Et d’abord n’oublions pas que le phénomène est réversible, et que nous