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rapproche le plus de l’homme ? M. Duvernoy n’attachait qu’une médiocre importance à cette question, tant lui semblait grande la distance entre notre espèce et le groupe des quadrumanes. Il observait cependant que le chimpanzé a une capacité crânienne plus grande que le gorille, ce qui expliquerait le contraste entre la férocité de ce dernier et l’intelligence du premier. Il est au reste très difficile d’établir une hiérarchie rigoureuse parmi les singes supérieurs : un genre peut sur un certain point se rapprocher plus qu’un autre de l’homme, mais s’en écarter davantage sur un point différent de l’organisation. M. Wyman et Isidore-Geoffroy Saint-Hilaire ont placé le chimpanzé avant le gorille ; le professeur Owen admet au contraire la série descendante : gorille, chimpanzé, orang, gibbon. Dans ces derniers temps, la comparaison de l’homme et des singes supérieurs a été reprise, surtout au point de vue de l’anatomie du cerveau. M, Owen a signalé dans cet organe, chez l’homme, des particularités qui, suivant lui, font défaut chez les quadrumanes. « Le cerveau de l’homme, disait-il à Oxford en 1860 à la réunion de l’Association britannique, indique un progrès plus décisif et plus marqué que celui qu’on observe en passant d’une sous-classe à une autre avant d’arriver à lui. Les hémisphères cérébraux débordent le cervelet ; ce développement est particulier à l’homme ; il en est de même pour la posterior cornu du ventricule latéral et pour l’hippocampus minor, qui caractérisent le lobe postérieur de chaque hémisphère[1]. La substance grise superficielle du cerveau, en raison du nombre et de la profondeur des circonvolutions, atteint son maximum d’étendue chez l’homme. Des pouvoirs mentaux particuliers sont associés à cette forme particulière du cerveau, et par l’estimation que j’en fais je suis conduit à regarder le genre homo non comme le simple représentant d’un ordre distinct, mais comme appartenant à une sous-classe distincte de mammifères, pour lesquels je propose le nom de archencephala. »

M. Huxley protesta immédiatement contre ces conclusions et déclara que le troisième lobe n’est point caractéristique de l’homme,

  1. Le cerveau, on le sait, est divisé en deux moitiés nommées hémisphères et séparées par une cloison verticale. À la face inférieure du cerveau, on distingue dans chaque hémisphère trois lobes séparés entre eux par des sillons et désignés sous le nom de lobes antérieur, moyen et postérieur. Le cervelet est placé sous la partie postérieure du cerveau. Quand on incise le cerveau, on trouve dans l’intérieur une cavité, car la matière cérébrale n’est pas assez abondante pour remplir toute la boite crânienne. Cette cavité a la forme d’une fissure à peu près parallèle à la ligne de séparation des deux hémisphères. Elle a trois branches ou cornes, l’une dirigée en avant, l’autre en arrière, la troisième latéralement. Chez le chien, cette cavité n’a que deux branches ; la branche postérieure manque. Quant à l’hippocampus minor, c’est une petite éminence qui se montre dans la corne postérieure de l’homme.