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qu’entre les grands centres de population : ainsi, dans la direction de la Russie, de Paris à Francfort, de Francfort à Berlin, de Berlin à Saint-Pétersbourg. À chacun des points intermédiaires, la dépêche s’arrête et reprend son tour de passage au milieu de celles qui attendent. La somme de ces petits retards ne serait pas considérable, s’il ne s’y ajoutait les interruptions dues aux accidens et surtout aux influences météorologiques. Ces perturbations sont d’autant plus appréciables que l’espace parcouru est plus grand, Aussi regarderions-nous comme un beau résultat, lorsque la ligne de l’Inde sera terminée, que les dépêches de Calcutta parvinssent à Paris le lendemain de leur date. Ne demandons pas à la télégraphie plus qu’elle né peut donner.

Les perturbations qu’éprouvent les fils sous l’influence des phénomènes météorologiques sont un des inconvéniens les plus graves auxquels sont soumises les lignes télégraphiques terrestres ; il faut ajouter qu’elles exigent une surveillance et un entretien de tous les instans. Cependant il y a une tendance bien marquée à les préférer aux lignes sous-4narines, pour peu que le choix entre les deux soit possible. Le nouveau tracé du télégraphe des Indes en est un exemple. Ce n’est pas à dire toutefois que cette préférence soit absolue. Dans les conditions où la télégraphie sous-marine promet un succès certain, lorsque les distances sont courtes et les profondeurs faibles, les lignes sous-marines remplacent à leur tour les lignes terrestres. Ainsi le gouvernement italien vient de faire immerger un câble entre la Sardaigne et la Sicile, afin de compléter, par la Corse et la Spezzia, une communication entre Turin et Palerme indépendante des provinces napolitaines. Ceci, comme le câble de Toulon à Ajaccio, dont nous avons parlé ailleurs, donne assez bien la mesure de ce que peut faire la télégraphie océanique et des limites où la prudence la plus stricte peut avoir pleine confiance en ses procédés.

Sans contredit, il y a longtemps que l’industrie des câbles serait passée dans le domaine ordinaire de la pratique, si les mers.de notre planète avaient quelques centaines et non point quelques milliers de kilomètres entre leurs rivages opposés. Forcés que nous sommes d’accepter les conditions que la nature nous a imposées, il ne nous est pas permis de reculer devant les difficultés, et nous devons appuyer des entreprises, fussent-elles téméraires, qui éclaireront d’un jour nouveau les questions en litige. Vers l’Orient, la télégraphie s’étendra sans de nouveaux efforts, les résultats acquis lui suffisent : elle n’a plus qu’à s’imposer aux peuples qui ne la connaissent pas encore ; mais aborder l’Amérique par l’Asie orientale nous semble une entreprise plus chimérique, disons mieux, moins probable que de franchir directement l’Atlantique. C’est la traversée de l’Atlantique