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traverse l’Asie-Mineure, et descend la vallée de l’Euphrate pour aboutir à Bassorah, en passant par Sivas, Diarbekir et Bagdad. Sur ce trajet se greffera un embranchement dirigé vers Téhéran, afin de relier la capitale de la Perse au réseau européen. À partir de Bassorah, le gouvernement indien, qui n’a voulu concéder cette entreprise à aucune compagnie, va faire immerger un câble de 1,200 à 1,500 kilomètres de longueur, dont le second point d’atterrissement sera à Gwadel, sur la côte du Béloutchistan. Enfin, de Gwadel à Kurrachee, une ligne terrestre complétera le circuit. Tous ces travaux sont en voie d’exécution, et sont poussés avec une extrême activité. On peut donc espérer que la communication avec les Indes sera complète avant la fin de l’année 1863.

Cette ligne présente des garanties de durée incontestables, puisqu’elle ne comporte qu’une section sous-marine dont la longueur n’est pas exagérée ; mais on peut prédire à coup sûr que les transmissions échangées avec l’Inde par cette voie seront très lentes. Ce n’est pas une petite entreprise que de faire passer une dépêche de Paris à Constantinople à travers cinq ou six états dont chacun a ses procédés spéciaux d’exploitation. Puis, sur un parcours de plusieurs milliers de kilomètres, que de chances pour une interruption temporaire par un orage ou par tout autre accident ! Au fond, il importe peu, car, pour une distance si grande, le temps que le télégraphe gagne sur le courrier ordinaire est toujours considérable. Qu’une dépêche mette deux jours au lieu de deux heures pour se rendre de Calcutta à Londres, le résultat n’en est pas moins merveilleux. D’ailleurs les transmissions officielles des gouvernemens, les plus importantes de toutes, devanceront encore les transmissions purement commerciales, grâce au droit de priorité que les traités internationaux leur garantissent partout.

Les retards inévitables que les dépêches éprouveront en traversant l’Europe pour gagner l’Asie-Mineure seront atténués par la multiplicité des voies qui leur seront ouvertes. Déjà une compagnie s’est formée sous le nom de compagnie des télégraphes de la Syrie pour relier Alexandrie à Diarbekir par El-Arish et Beyrouth. Dans la Méditerranée, si bien connue, si bien sondée depuis quelques années, la télégraphie sous-marine s’étendra inévitablement, à mesure que les procédés se perfectionneront, car l’activité commerciale est grande sur tous ses rivages. Oran sera mis en communication avec Carthagène ; Tunis, où aboutit notre réseau d’Algérie, correspondra avec Malte ou Tripoli, qui n’en sont pas bien éloignés ; Athènes se reliera à Candie et à l’Égypte. Toutes ces lignes sont indiquées par les besoins actuels, et elles se compléteront mutuellement, s’assureront les unes les autres contre les chances d’interruption.