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en honneur les exemples de nos aïeux qui disparaissaient de nos mœurs, et j’ai laissé moi-même des exemples dignes d’être suivis par nos descendans. »


Gaston Boissier.


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REVUE MUSICALE.


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Décidément l’année, qui est si féconde en grands événemens politiques, passera sans que les théâtres, lyriques de Paris et de l’Europe aient pu donner le jour à un ouvrage nouveau de quelque valeur. C’est le vieux qui règne, c’est toujours la Muette de Portici qui fait vivre honorablement l’Opéra, et non pas la Mule de Pedro, intermède en deux actes, dont la première représentation a eu lieu le il mars. Cette mule célèbre, dont M. Dumanoir nous raconte les vertus, est la propriété de Pedro, riche fermier d’un village de la Vieille-Castille. Il est jeune, il est riche, il est garçon, et il voudrait compléter son bonheur en épousant Gilda, fille du batelier Hernandez ; mais la charmante Gilda a son cœur engagé. Elle aime un ami d’enfance, Tebaldo, qui est parti pour l’armée, et elle l’attend pour l’épouser. Gilda refuse donc les offres de Pedro, qui paraît fort étonné de la résistance que lui oppose une jeune fille sans fortune. Piqué au jeu, comme on dit, surtout à cause des railleries de ses amis, qui rient de sa mésaventure, Pedro forme le projet de l’enlever et de la conduire de force dans sa demeure. Cette action un peu brusque qui s’accomplit nuitamment, au bruit des grelots de la mule vaillante, n’amène pas le résultat qu’en espérait Pedro ; Le ravisseur est joué, bafoué par Gilda, qui est d’un esprit moins simple qu’il ne le pensait. Après quelques incidens de mise en scène, qui sont assez ingénieusement amenés, Pedro prend tout à coup une détermination des plus généreuses. Non-seulement il renonce à la main de Gilda, qu’il tient prisonnière dans sa maison, mais il pousse l’abnégation jusqu’à donner à Tebaldo les moyens de racheter un homme et d’épouser celle qu’il aime. Ainsi finit cette simple histoire, qui ne serait pas plus ennuyeuse qu’une autre, si l’auteur du livret l’avait racontée dans un style moins lyrique et plus approprié au caractère dès personnages, qui ne sont après tout que des paysans.

La musique de la Mule de Pedro est de M. Victor Massé, l’auteur ingénieux et délicat de la Chanteuse voilée, de Galathée, des Noces de Jeannette et de la Reine Topaze, opéra en trois actes, qui fut représenté au Théâtre-Lyrique dans le mois de janvier 1857. La Reine Topaze, qui a eu un grand nombre de représentations, grâce au beau talent de Mme Carvalho, pour qui l’auteur avait écrit le rôle principal, est l’œuvre la plus considérable de M. Massé, celle où il a fait le plus d’efforts pour agrandir son style et ses idées, qui sont en général de courte haleine et plus gracieuses que saillantes. L’ouverture de la Mule de Pedro est une agréable petite symphonie composée de deux motifs qui se trouvent dans la partition, et que l’auteur a rattachés l’un à l’autre avec beaucoup dégoût. Le second motif surtout est développé avec élégance, et le tout forme une jolie introduction qui a