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sourire l’importance qu’attachait autrefois l’opposition de gauche à une loi organique où serait définie la responsabilité ministérielle : un projet de loi semblable figurait à perpétuité dans le programme de la gauche, qui ne prenait pas garde que la sanction de la responsabilité ministérielle résidait dans les chambres donnant ou retirant leur confiance aux cabinets. S’il était si difficile et si oiseux de faire sous le régime parlementaire une loi sur la responsabilité ministérielle, on devine que nous n’avons point l’impertinente pensée de demander la réglementation par une loi de la responsabilité impériale. Cette loi existe, elle n’est autre que la constitution elle-même. L’empereur, ayant la responsabilité, a l’initiative; mais le corps législatif, organe de la nation, a l’appréciation et le contrôle de la politique impériale. En matière de finances, l’empereur a exprimé le dessein, lorsqu’il a renoncé au système des crédits par décret, de contenir la dépense dans la limite des ressources prévues. L’expérience d’une première année vient de nous prouver que les précautions déjà prises pour que ce dessein s’accomplisse ne sont peut-être pas suffisantes. D’autres précautions seraient nécessaires. Par exemple, les prévisions des budgets dans le système français sont établies par les ministres dix-huit mois avant que les budgets deviennent exécutoires. Il est difficile que ces prévisions conservent leur précision et leur exactitude en présence de circonstances dont elles sont si éloignées. Ce procédé est une cause de confusion pour nos finances. Cette cause n’existe pas dans le système de plusieurs gouvernemens constitutionnels, de l’Angleterre et de la Belgique par exemple. L’exercice financier commence en Angleterre le 5 avril; le parlement est toujours rassemblé au commencement de février. Or les demandes de crédit sont présentées par les ministres en février et en mars, quelques semaines à peine avant le commencement de l’exercice : elles peuvent donc être établies avec plus d’exactitude. La session durant d’ailleurs jusqu’au mois d’août, le budget avant la séparation du parlement est déjà depuis plusieurs mois en cours d’exercice; les ministres ont déjà pu éprouver l’exactitude de leurs évaluations : si elles paraissent devoir être insuffisantes, ils ont encore le temps, avant la fin de la session, d’obtenir de la chambre des supplémens de crédit. Il en est de même en Belgique. On voit que, par une simple disposition de temps, d’autres pays s’assurent un meilleur et plus sûr maniement de leurs finances. Pourquoi ne ferait-on pas de même en France? Chez nous, l’année financière commence au 1er janvier; pourquoi la chambre ne serait-elle pas réunie au commencement de novembre? Pourquoi le budget de l’année prête à s’ouvrir ne serait-il pas présenté avec des évaluations toutes fraîches dans les deux premiers mois de la session? On éviterait ainsi les erreurs de prévisions qui sont si fâcheuses dans le système actuel; si l’on s’était trompé, on pourrait, avant la fin de la session, apporter à la chambre les rectifications nécessaires. Enfin les correspondances qu’auraient entraînées les viremens ou les dépassemens de crédit entre les départemens ministériels et l’empereur en tant que premier lord de la tré-