Page:Revue des Deux Mondes - 1863 - tome 44.djvu/170

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
SYLVINE

A M. P. P. THEURIET.

ADAGIO.


En haut, la salle est large et presque démeublée.
La mort est sur le seuil. — Du milieu de l’allée,
On entend dans la nuit râler le moribond,
Vieillard que la douleur a tordu comme un jonc.
La blafarde lueur d’une lampe fameuse
Laisse voir son grand front et sa face anguleuse,
Et ses yeux noirs au fond de l’orbite enfouis...
Auprès d’un bénitier où trempe un brin de buis,
Un vieux prêtre est assis dans la pénombre, et prie.
Soutenant du mourant la tête endolorie.
Un jeune homme au chevet se penche, et son regard
Triste et pieux s’attache à ce pâle vieillard
Qui souffre sans se plaindre et meurt sans épouvante.
Au dehors, l’ouragan déchaîné se lamente;
Au dedans, sur les murs, les portraits des aïeux,
Des splendeurs d’autrefois seuls débris précieux.
Contemplent gravement leur race à l’agonie.
— O sires de Paulmy, vous dont la baronnie
Valait des marquisats et des principautés.
Vous dont les châteaux forts menaçaient les cités,
Puissans seigneurs terriens, ruisselans de richesses.
Prélats et maréchaux, chambellans et comtesses,