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ment dans les bassins du Tigre et de l’Euphrate. Si l’on en croit les antiques traditions conservées dans le livre de Moïse de Khoren, les Arméniens seraient contemporains du premier empire de Ninive. On les voit du moins, vers le XVe siècle avant notre ère, compris avec les Assyriens dans la liste des peuples tributaires des dix-huitième et dix-neuvième dynasties égyptiennes. Des sculptures murales les représentent, au moment de leur captivité sur les bords du Nil, travaillant à la construction des grands édifices élevés par Thoutmosis III, Aménophis II, Séthos Ier et leurs successeurs. Beaucoup plus tard, au VIIIe siècle avant notre ère, alors que la domination égyptienne avait cessé depuis longtemps déjà dans l’Asie occidentale, et que les Assyriens étaient redevenus les maîtres de toutes les contrées voisines de leur empire, les Arméniens, qui étaient toujours restés dans la dépendance de conquérans étrangers, se rendent indépendans de Ninive. Barouïr, leur satrape, allié de Bélésis et d’Arbace dans leur révolte contre Sardanapale, obtient en récompense de l’appui qu’il avait prêté au fondateur de la dynastie des Mèdes le titre de roi. Toutefois cette indépendance est de courte durée, car les inscriptions du palais de Khorsabad mentionnent les Arméniens des provinces d’Ararat et de Van comme tributaires des monarques ninivites et comme faisant partie des populations soumises à la puissance de Sargon et de ses successeurs.

La conquête macédonienne, puis celle des Parthes interrompent le règne de l’ancienne dynastie nationale jusqu’au milieu du IIe siècle avant Jésus-Christ. Alors une ère nouvelle commence pour les Arméniens : un prince de la race des Arsacides de Parthie, Valarsace, investi par son frère Arsace le Grand du gouvernement de l’Arménie avec le titre de roi, prépare la grandeur de la nation dont les destinées lui sont confiées. Moïse de Khoren a retracé dans son histoire le tableau de l’organisation politique de sa patrie sous le règne du premier Arsacide, et ce qui rend ce tableau plus curieux, c’est que tout porte à croire qu’il ne fait que reproduire le mode d’organisation politique existant dans la Perse, et que les Parthes avaient emprunté aux plus anciennes monarchies de l’Orient. L’un des successeurs de Valarsace, dont le nom a jeté tant d’éclat à l’époque où Mithridate défendait contre les envahissemens de Rome le sol asiatique, Tigrane le Grand, soumit l’empire des Séleucides ; mais la fortune, d’abord favorable à ses armes, lui devint contraire au moment même où il s’était élevé à l’apogée de la puissance. Obligé d’abandonner la plus grande partie de ses conquêtes, il ne transmit à ses successeurs qu’un état affaibli qui allait devenir bientôt le jouet de la politique des Romains et des Perses. Le royaume d’Arménie, théâtre des luttes perpétuelles des deux puis-