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L’argent par lui-même est improductif, et la société tout entière est intéressée à ce que les écus ne sommeillent point. Les banquiers, ils l’avouent eux-mêmes, ne créent point le capital ; ils ne peuvent rien y ajouter ; mais ils distribuent le signe de ce capital, et en le distribuant, ils fécondent le travail sous toutes les formes, favorisent les transactions journalières d’homme à homme et facilitent, quelquefois même sans bourse délier, les achats de marchandises. Est-il besoin d’insister sur les avantages bien connus d’un système qui enveloppe en Angleterre, comme dans un vaste réseau, toutes les classes de la société[1] ? Il est pourtant un fait que je dois signaler. Les banques n’ont pas seulement chez nos voisins rendu plus efficace la circulation de l’argent ; elles ont développé en outre la valeur de l’honnêteté. Aux yeux du banquier, la moralité de ses cliens est un capital. Il est en effet de son intérêt de faire entrer en ligne de compte le caractère de ceux avec lesquels il traite. Il y a, dit-on, plus d’un exemple en Angleterre de personnes qui se sont élevées de l’obscurité vers une position sociale par la confiance qu’elles inspiraient à leur banquier. Ce n’est point seulement en ouvrant un crédit ou en escomptant des billets que celui-ci peut aider son client : l’opinion favorable d’un banquier facilite notablement les relations d’un homme actif et vraiment digne d’appui.

La Banque d’Angleterre conduit l’ordre d’affaires connues sous le nom de banking dans trois grandes salles qui se touchent et se continuent les unes les autres : la première est le private drawing office (bureau consacré aux affaires des particuliers) ; la seconde est le public drawing office (bureau où se liquident tous les comptes du gouvernement) ; vient ensuite le bill office (bureau où s’escomptent les billets à ordre). Le private drawing office se subdivise de son côté en deux sections, dont l’une est dévolue aux rapports avec les banquiers et l’autre aux rapports avec les cliens : cette dernière est représentée par un comptoir entrecoupé de lettres alphabétiques. Les deux grandes opérations consistent surtout à recevoir l’argent et à payer. La Banque reçoit l’argent des particuliers sous forme de dépôts. Toute personne présentée par des amis recommandables peut ouvrir un compte courant avec la Banque, pourvu seulement que les conditions soient jugées suffisamment avantageuses. À partir de ce moment, la Banque rend toute sorte de services à ses cliens : elle vend et achète pour eux, touche leurs dividendes, fait leurs paiemens dans presque tous les pays du monde, gère en un mot leurs intérêts d’après les mêmes principes adminis-

  1. Le principe des banques anglaises est que l’argent qui n’est point immédiatement nécessaire à une personne puisse passer par ce canal entre les mains d’une autre qui le fasse fructifier.